Les parlementaires républicains ont décidé de publier un rapport confidentiel qui révèle selon eux des abus dans la surveillance de la campagne électorale de Donald Trump en 2016, alors que l'enquête du procureur spécial Robert Mueller se rapproche du président américain.

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Le département de la Justice et le FBI se sont fermement opposés à la publication de ce rapport qui contiendrait des informations sensibles sur les opérations américaines de contre-espionnage.

Mais la commission du renseignement de la Chambre des représentants, présidée par le républicain Devin Nunes, a passé outre et approuvé lundi soir la divulgation du document de quatre pages.

La Maison-Blanche a désormais cinq jours pour décider si ce rapport doit rester secret mais selon des informations de presse non confirmées, le président serait favorable à sa publication.

Selon Mark Meadows, un républicain radical, il révèlerait «des abus de surveillance de la part du gouvernement» dans l'enquête des agences de renseignement qui avaient conclu à une ingérence de Moscou pendant la campagne électorale. Le rapport pointe notamment les documents utilisés par la Justice pour obtenir l'autorisation de surveiller Carter Page, un conseiller diplomatique du candidat Trump ayant des contacts réguliers avec des responsables russes.

Pour les démocrates, le rapport est un moyen détourné de discréditer une autre enquête, beaucoup plus embarrassante pour le président, ouverte en mai 2017 par le procureur spécial Robert Mueller sur une éventuelle collusion entre le Kremlin et l'équipe Trump pour influencer la campagne. Le but des républicains serait d'obtenir le départ de M. Mueller.

Donald Trump et son équipe ont toujours nié toute collusion, dénonçant «une chasse aux sorcières».

«Un an après que nos agences de renseignement ont unanimement conclu que la Russie a attaqué notre démocratie, les républicains de la Chambre s'en prennent au FBI et au département de la Justice», a déploré mardi l'élu démocrate Mark Warner.

Selon les médias, le rapport concentre ses critiques sur un ex-espion britannique, Christopher Steele, auteur d'une enquête controversée sur les liens entre Donald Trump et la Russie. Menée pendant la campagne présidentielle, l'enquête a été payée par la société Fusion GPS, commanditée notamment par l'équipe de la candidate démocrate Hillary Clinton.

«Portrait biaisé»

L'enquête Steele a également servi de base au département de la Justice pour obtenir l'autorisation d'intercepter les communications internet de Carter Page. Pour les républicains, la Justice a fait une erreur - au pire une faute - en s'appuyant sur un «dossier Steele» partial car financé par les démocrates qui étaient alors encore au pouvoir. La commission vise notamment le N.2 du département, Rod Rosenstein, qui a obtenu la prolongation de cette autorisation après l'arrivée au pouvoir de M. Trump.

Paul Ryan, le président républicain de la Chambre, a estimé nécessaire la publication du rapport, évoquant de possibles «malversations de certains individus dans le FBI» qui seraient des opposants au président. «Nous devons faire rendre des comptes à ces gens s'ils ont enfreint les règles, s'ils ont agi de manière inappropriée», a-t-il affirmé mardi devant la presse.

Mais pour Adam Schiff, chef de la minorité démocrate à la commission du renseignement, les républicains utilisent un rapport «rempli d'inexactitudes» et qui dresse «un portrait biaisé du FBI» alors que le président est désormais visé directement dans l'enquête. Le procureur Mueller souhaite en effet l'interroger pour tenter de déterminer si M. Trump s'est rendu coupable d'entrave à la justice, notamment en limogeant en mai 2017 le patron du FBI James Comey.

La semaine dernière, M. Trump a démenti des informations de presse selon lesquelles il avait aussi voulu limoger en juin le procureur Mueller, avant de se raviser.

«C'est une tentative de mettre les chariots en cercle autour de la Maison-Blanche et créer une diversion face à l'enquête russe», a estimé M. Schiff.

Selon les démocrates, les républicains tentent d'impliquer M. Rosenstein, qui avait nommé le procureur spécial, pour obtenir son éviction du ministère, en espérant que son remplaçant ait les mains libres pour limoger Robert Mueller et mettre fin à l'enquête.

REUTERS

Carter Page à Moscou en décembre 2016.