L'ancien directeur de campagne de Donald Trump, Paul Manafort, a plaidé non coupable lundi des accusations qui le visent dans l'enquête sur l'ingérence russe dans la présidentielle 2016, lors de sa première comparution devant une juge fédérale.

M. Manafort et son associé Richard Gates ont rejeté les 12 chefs d'inculpation dont ils sont l'objet, parmi lesquels complot contre les États-Unis, blanchiment, fausses déclarations et non déclarations de comptes détenus à l'étranger, lors de cette audience publique à Washington.

Paul Manafort a été assigné à résidence par la juge fédérale.

L'acte d'inculpation de M. Manafort, signé par le procureur spécial Robert Mueller, ne suggère toutefois pas de collusion entre l'équipe du candidat républicain et les autorités russes qui aurait pu fausser l'élection présidentielle de 2016.

>>> Consultez l'acte d'accusation (en anglais)

Réagissant sur Twitter, M. Trump a affirmé plus tôt que les faits reprochés à M. Manafort remontaient à « des années ». « Il n'y a AUCUNE COLLUSION ! », a-t-il également écrit.

M. Manafort avait rejoint l'équipe de campagne du milliardaire républicain en mars 2016, avant d'être contraint de démissionner quelques mois après.

« Pourquoi Hillary la crapule et les démocrates ne sont-ils pas visés ????? », a ajouté le président américain.

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Paul Manafort quitte sa résidence d'Alexandria en Virginie, le lundi 30 octobre 2017.

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Richard Gates

Dans une initiative judiciaire distincte, mais s'inscrivant dans cette même enquête ultra-sensible, George Papadopoulos a été mis en accusation et a plaidé coupable d'avoir menti aux enquêteurs du FBI, a annoncé lundi M. Mueller.

M. Papadopoulos, qui était chargé des questions de politique étrangère au sein de l'équipe de campagne, a par ses fausses déclarations « entravé l'enquête en cours du FBI sur l'existence de liens ou de coordination éventuels entre des personnes associées à la campagne et le gouvernement russe pour interférer dans l'élection présidentielle de 2016 », souligne l'acte signé par le procureur.

George Papadopoulos est accusé d'avoir menti sur les contacts qu'il entretenu à partir du mois de mars 2016 avec des intermédiaires du gouvernement russe.

L'un de ces intermédiaires présenté comme « le professeur » a affirmé en avril 2016 à M. Papadopoulos que les Russes détenaient de quoi « salir » la candidate Hillary Clinton sous la forme de « milliers de courriels », peut-on lire dans l'acte d'accusation.

M. Papadopoulos a alors tenté « à de multiples reprises » de mettre en contact la campagne de Donald Trump et des officiels russes et a travaillé à une possible rencontre entre Vladimir Poutine et le candidat républicain, qui n'a pas eu lieu.

Le piratage d'un compte courriel de l'ancien directeur de campagne de la candidate démocrate Hillary Clinton, John Podesta, et du parti démocrate a été rendu public en juin.

Les milliers de courriels piratés ont ensuite été diffusés en octobre par le site internet WikiLeaks pendant la campagne présidentielle.

Après l'élection de novembre 2016, les services de renseignement américains avaient conclu à des interférences de la Russie pour tenter d'influencer le résultat du scrutin.

George Papadopoulos a dans un premier temps nié ou minimisé ses contacts avec des intermédiaires russes avant d'accepter de collaborer avec le procureur spécial. Après avoir été interrogé par les services du FBI, il avait par exemple désactivé son compte Facebook pour supprimer des conversations avec le « professeur » précise encore l'acte d'accusation.

Ces annonces offrent un vif contraste avec le secret et la discrétion qui entourent depuis six mois la tentaculaire enquête menée par M. Mueller, un ancien patron de la police fédérale américaine qui a été nommé en mai pour diriger ces investigations sur l'ingérence russe dans l'élection présidentielle.

Contrairement à un simple procureur fédéral, M. Mueller dispose d'une plus grande latitude d'action et d'une indépendance renforcée.

Paul Manafort s'est rendu lundi au bureau du FBI du Washington.

MM. Manafort et Gates se voient principalement reprocher des activités non déclarées de lobbyiste et consultant en faveur de l'ancien président ukrainien prorusse, Viktor Ianoukovitch.

Plus de 75 millions de dollars ont transité par des comptes offshore gérés par les deux hommes, Paul Manafort étant accusé d'avoir blanchi à lui seul 18 millions de dollars.

Ces opérations lui ont permis de « mener grand train » aux États-Unis, acquérant notamment diverses propriétés luxueuses, souligne l'acte d'accusation.

Pour M. Trump, qui ne cesse de dénoncer l'enquête confiée à M. Mueller comme une « chasse aux sorcières » reposant sur du néant, ces inculpations sont un coup, car elles viennent confirmer la réalité d'infractions criminelles présumées.

Popularité en berne

Mais, en même temps, M. Trump peut pour l'heure constater avec soulagement que le soupçon le plus grave, celui d'être arrivé à la Maison-Blanche grâce à une entente avec un pouvoir étranger, n'est pas étayé.

Cette accélération des investigations intervient en tout cas à l'approche du premier anniversaire de son élection, le 8 novembre 2016.

Le successeur de Barack Obama vante la bonne santé économique des États-Unis, avec une croissance de 3% au troisième trimestre. Mais sa popularité reste en berne, comme l'a confirmé un nouveau sondage publié dimanche: 38% des Américains approuvent l'action du 45e président des États-Unis, contre 58% d'opinions négatives.

Au Congrès, où des enquêtes distinctes sur les ingérences russes sont en cours, le sénateur démocrate Mark Warner a averti Donald Trump qu'il serait « inacceptable » qu'il fasse usage de son droit de grâce, comme le permet la Constitution.

Comme d'autres élus, il voyait dans les mensonges de George Papadopoulos sur ses contacts avec des Russes une raison supplémentaire de poursuivre les investigations.

Ces derniers jours Donald Trump a tenté d'allumer des contre-feux visant les démocrates et Hillary Clinton, accusée elle-même de collusion avec la Russie lors de la vente de la société canadienne Uranium One, détenant des mines américaines, au groupe public russe Rosatom en 2010.

Photo tirée du compte Twitter @GeorgePapa19

George Papadopoulos