Un policier américain accusé d'homicide involontaire sur un homme noir, qu'il avait abattu sous les yeux de sa compagne et d'une fillette dans une séquence filmée en direct, a été acquitté de tous les chefs d'inculpation vendredi.

Le policier d'origine hispanique, Jeronimo Yanez, 29 ans, était également accusé d'avoir mis en danger, avec ses tirs, la compagne et la fille de quatre ans de cette dernière, assise sur la banquette arrière du véhicule. Il a été totalement blanchi par les jurés après une trentaine d'heures de délibérations.

«Mon fils a été assassiné», a dénoncé, après le verdict, la mère de Philando Castile, tué à 32 ans lors d'un contrôle de police vers Saint Paul, dans le nord des États-Unis, le 6 juillet 2016.

L'employé de cantine avait été arrêté pour un phare cassé.

«Le système continue d'être injuste pour les Noirs et il continuera d'être injuste pour vous tous», s'est indignée Valerie Castile lors d'une conférence de presse devant le tribunal du comté de Ramsey. «Juste parce que c'est un policier, il ne se passe rien», a-t-elle encore déploré, se disant «très déçue».

Son avocate, Glenda Hatchett, a regretté une «mort tragique et inutile». «Cette fois, nous aurions dû bien faire les choses. Cette fois, nous avions un jeune homme sans casier judiciaire. (...) Cette fois nous aurions dû avoir une issue très, très différente», a-t-elle martelé.

«Si Philando a pu mourir dans ces circonstances, soyons clairs, chacun de vous pourrait mourir dans ces circonstances», a poursuivi l'avocate. «Nous n'abandonnerons pas, nous continuerons à nous battre».

Les affaires de brutalités policières envers les Noirs rythment l'actualité aux États-Unis, où les condamnations de policiers restent rares.

«Grave problème de racisme»

Sa mort et celle d'un autre Noir abattu par des policiers peu avant avaient provoqué des manifestations dans tout le pays. C'est au cours de l'une d'elles à Dallas, au Texas, qu'un tireur isolé voulant venger la mort des Noirs abattus par les forces de l'ordre avait tué cinq policiers le 7 juillet 2016.

Le verdict de vendredi «envoie le message très dur que nous avons encore un grave problème de racisme dans ce pays», a estimé Jaylani Hussein, responsable au Minnesota du Conseil des relations américano-islamiques (CAIR), sur la chaîne locale KSTP.

Les autorités ont appelé au calme. «J'exhorte chacun d'entre vous à agir de façon pacifique et respectueuse envers les autres: les habitants, les manifestants et les policiers», a écrit le maire de Saint Paul, Christopher Coleman, dans un communiqué.

Dans une séquence particulièrement bouleversante, les derniers instants de Philando Castile avaient été filmés et retransmis en direct sur Facebook Live par sa compagne, Diamond Reynolds. On le voyait agonisant, le T-shirt blanc maculé de sang, sur le siège de la voiture tandis que le policier le tenait en joue. La fillette tentait d'une voix timide de rassurer sa mère.

«Je n'essayais pas de l'attraper», a déclaré Philando Castile dans ses derniers instants, en parlant de l'arme à feu qu'il portait légalement, ce dont il avait prévenu le policier.

Pendant l'enquête, le policier avait affirmé que Philando Castile avait fait un geste qui ne lui permettait pas de voir sa main droite, ce qui lui avait fait craindre pour sa sécurité et pour celle de l'agent qui l'accompagnait.

Mais le procureur John Choi avait estimé que «la peur non rationnelle» ne pouvait pas «justifier l'emploi de la force létale». Il avait insisté sur le ton calme et «non menaçant» de Philando Castile quand il avait informé l'agent qu'il portait une arme.

Avant de parvenir à leur conclusion, les jurés avaient demandé au juge à revoir la vidéo de la mort de Philando Castile ainsi que les images enregistrées depuis la voiture des policiers et le témoignage de Jeronimo Yanez à la barre.

Photo Jim Mone, AP

Philando Castile