Donald Trump a mis un terme jeudi soir aux négociations sur sa réforme de la santé, défiant les rebelles de la majorité républicaine qui menacent de torpiller la première grande loi de son mandat.

> Réagissez sur le blogue de Richard Hétu

Le message du président américain s'assimile à un ultimatum. Il a fait savoir au groupe majoritaire, réuni en urgence dans la soirée au Capitole, qu'il exigeait un vote à la Chambre des représentants vendredi pour abroger et remplacer «Obamacare», quelle qu'en soit l'issue.

«Si cela échoue, on passera à autre chose que la santé», a résumé l'élu républicain Chris Collins. «Et Obamacare restera en place».

Un vote de procédure aura lieu vendredi vers 10 h, avant un vote final vendredi après-midi.

Initialement, le vote devait avoir lieu jeudi, mais les chefs républicains avaient été obligés de reporter le scrutin face aux divisions internes. À la fin d'une folle journée de réunions d'un bout à l'autre de Washington, Donald Trump a sifflé la fin de la période de marchandages.

«Nous avons promis aux Américains que nous abrogerions et remplacerions cette loi défaillante», a déclaré Paul Ryan, président de la Chambre et architecte de la réforme. «Et demain, nous voterons».

«Nous ne négocions plus, c'est fini», a martelé Chris Collins, qui votera oui. C'est le ministre du Budget Mick Mulvaney qui est venu délivrer le message aux parlementaires.

Promulguée il y a sept ans jour pour jour, la loi sur l'assurance maladie de Barack Obama est depuis la cible prioritaire des républicains, symbole selon eux d'une socialisation de la médecine.

À chaque échéance électorale, ils ont promis aux Américains de l'abroger dès qu'un républicain siégerait à la Maison-Blanche. C'est le cas depuis le 20 janvier, mais la promesse est plus difficile à tenir que prévu.

Républicains divisés

L'opposition vient de la minorité démocrate, sans surprise, mais aussi de républicains modérés et d'un groupe d'ultraconservateurs. Chacun estime que l'équilibre trouvé par les chefs républicains penche trop de l'autre côté:

- Pour les républicains modérés, abroger Obamacare est inacceptable si cela conduit à une hausse du coût de la santé et une perte de couverture pour des millions de personnes, ce que le plan républicain provoquera, selon les experts.

- Pour les ultraconservateurs, la loi élaborée par les chefs républicains ne va pas assez loin dans le désengagement public d'un marché qui devrait, selon eux, être entièrement privé. Ils critiquent le fait que des dispositifs d'aides et des réglementations d'Obamacare soient conservées.

Ces derniers, regroupés dans le «Freedom Caucus», ont toutefois arraché des concessions.

Ils ont obtenu la suppression de l'obligation pour les assureurs de couvrir les dix services essentiels instaurés par Obamacare, notamment les urgences, la grossesse et la maternité ou encore la santé mentale. Le but, disent-ils, est de faire baisser le prix de l'assurance pour les Américains qui ne voudraient pas se couvrir contre ces risques.

Mais selon le principe des vases communicants, des concessions à une faction peuvent coûter des voix dans une autre.

On ignorait jeudi soir si le nouveau texte sera adopté.

Vendredi, 192 élus démocrates et 237 républicains devraient être présents pour voter, ce qui place la barre à atteindre à 215 voix.

Étapes suivantes

Donald Trump a investi un temps considérable dans l'abrogation d'Obamacare. Il s'est rendu au Congrès pour plaider la discipline de groupe, et a reçu des dizaines d'élus à la Maison-Blanche.

Son argument a d'abord été politique: si les républicains ne tiennent pas leur promesse, ils seront assurés de perdre la confiance de leurs électeurs et leur majorité au Congrès aux législatives de novembre 2018.

C'est la première fois depuis 2006 que les républicains contrôlent à la fois la Maison-Blanche et les deux chambres du Congrès.

Si le texte était adopté par la Chambre vendredi, le Sénat l'examinera la semaine prochaine. Il est acté qu'il sera alors profondément amendé, mais les républicains auront au moins eu la satisfaction de passer le premier obstacle de la Chambre.

L'enjeu, pour Donald Trump, dépasse le seul domaine de la santé.

Son bilan reste mince depuis son arrivée au pouvoir. Et les républicains martèlent que l'abrogation d'Obamacare était la condition préalable à la grande réforme fiscale qu'ils veulent adopter cette année.