Le procès d'un mafieux de 80 ans, accusé de racket, d'extorsion et de meurtres, s'est ouvert lundi à New York, 37 ans après un braquage historique évoqué dans le film de Martin Scorsese GoodFellas.

Vincent Asaro, l'un des anciens «street boss» présumés de la famille Bonanno, l'une des cinq familles new-yorkaises liées à Cosa Nostra, plaide non coupable pour ces crimes étalés sur 45 ans, de 1968 à 2013, et pour lesquels il risque la réclusion à perpétuité.

Il avait été arrêté en janvier 2014, quelques mois après un triple pontage.

Cheveux coiffés à l'arrière, portant un pull sans veste, il était assis lundi aux côtés de ses avocats au tribunal fédéral de Brooklyn à New York, dans une salle archi-comble.

Le 11 décembre 1978, à l'aéroport John F. Kennedy, des malfaiteurs armés et masqués, avaient neutralisé une dizaine d'employés pour s'emparer de 5 millions en argent liquide et 1 million en bijoux, soit l'équivalent de 20 millions de dollars actuels, entreposés dans un coffre.

Leur butin était arrivé peu auparavant d'Allemagne par la compagnie Lufthansa. Rien n'en a jamais été retrouvé.

C'est le cambriolage le plus important jamais commis aux États-Unis.

Asaro est le premier et probablement dernier membre présumé de la mafia poursuivi dans cette affaire.

Un témoin à charge a affirmé lundi que son patron, Joe Massino, avait récupéré peu après une valise pleine de bijoux auprès d'Asaro, qu'il a décrit comme quelqu'un de colérique, qui hurlait quand il n'obtenait pas ce qu'il voulait.

Salvatore Vitale, 68 ans, ancien numéro 2 de la famille Bonnano, a expliqué que Massino lui avait ensuite donné un collier du butin. «Il dépensait toujours beaucoup, il m'a donné une chaîne en cadeau» a témoigné Vitale, devenu informateur après son arrestation en 2003.

Vitale avait été condamné en 2010 à son temps déjà passé en prison, pour plus de 11 meurtres. Il est désormais libre, mais placé dans un programme de protection des témoins.

Quelques jours après le cambriolage, il conduira Massino avec sa valise chez un marchand de diamants. «Joe est allé dans une arrière salle, et je n'ai jamais revu la valise».

Informateur étranglé avec une chaîne 

Vincent Asaro, dont le procès doit durer plusieurs semaines, est aussi accusé d'avoir étranglé un informateur présumé, Paul Katz en 1969, avec une chaîne servant à attacher les chiens.

Des cheveux et un reste de main droite ayant appartenu à M. Katz avaient été retrouvés dans une cave de New York en 2013, où ses restes avaient été déplacés par précaution dans les années 1980.

L'acte d'accusation se lit comme un roman noir, entre meurtres, cambriolages, extorsion, menaces, incendies criminels, jeux d'argent et autres brassages d'argent illégaux.

Mais les avocats de Vincent Asaro ont invoqué le manque de preuves.

«Si Vincent Asaro est vraiment l'individu dangereux, violent, assassin décrit par le gouvernement, pourquoi a-t-il fallu si longtemps pour l'arrêter?», a interrogé son avocate Diane Ferrone.

Apparemment dénoncé par un cousin, il avait été arrêté en janvier 2014, lors d'un coup de filet où quatre autres personnes avaient été interpellées dont son fils et complice présumé Jerome.

Après le cambriolage de JFK, la police avait acquis la certitude que le cerveau de l'opération était Jimmy Burke, de la famille Lucchese, l'une des cinq familles new-yorkaise de Cosa Nostra.

En quelques mois, une dizaine de personnes impliquées de près ou de loin dans l'opération avaient été tuées, apparemment à l'initiative de Burke, qui mourra en prison d'un cancer en 1996, condamné dans une autre affaire.

Burke a servi d'inspiration pour le personnage de Jimmy Conway (Robert de Niro) dans GoodFellas, qui retrace la montée et la chute d'associés de la famille Lucchese et évoque le braquage de JFK. Sorti en 1990, le film a connu un succès considérable. L'accusé n'y est pas mentionné.

Vincent Asaro est aussi accusé d'avoir ordonné le meurtre d'un cousin dans les années 1980 --qui réussit à s'enfuir-- et de plusieurs autres attaques à main armée avec son fils Jerome.

M. Asaro et son fils sont également accusés d'un incendie criminel au début des années 1980 dans le quartier du Queens à New York, et d'au moins deux opérations ayant rapporté plus de 2 millions de dollars au milieu des années 80.

ARCHIVES AP

La police inspecte une camionnette suspecte suite au cambriolage à l'aéroport JFK, le 13 décembre 1978.