Mars 2013. Encore ébranlé par la sévère défaite de son candidat à la présidence, le Parti républicain conclut dans un rapport critique qu'il doit changer de stratégie avant les rendez-vous électoraux de 2014 et de 2016.

Les auteurs du document recommandent notamment aux républicains de s'ouvrir aux minorités, en particulier les Latinos, et de tenter de séduire l'électorat féminin ainsi que les jeunes. C'est ça, ou l'extinction politique.

Un an plus tard, le Parti républicain et ses élus du Congrès n'ont toujours pas mis en application ces recommandations, refusant d'adopter une réforme du système d'immigration ou d'assouplir leurs positions sur les questions sociales les plus controversées, dont l'avortement et le mariage homosexuel.

Et pourtant, les républicains ne pourraient guère être plus optimistes quant à leurs chances de succès aux élections de novembre prochain, celles de mi-mandat, qui renouvelleront l'intégralité de la Chambre des représentants et un tiers du Sénat.

«Je pense que nous nous dirigeons vers une élection de type tsunami», a déclaré la semaine dernière Reince Priebus, président du Comité national du Parti républicain, lors d'un petit-déjeuner organisé par le Christian Science Monitor.

Si cette prédiction se réalise, les républicains pourraient non seulement renforcer leur majorité de 17 sièges à la Chambre, mais également ravir aux démocrates leur mainmise sur le Sénat, où ceux-ci contrôlent 55 des 100 sièges. Et Barack Obama risquerait de trouver très longues ses deux dernières années à la Maison-Blanche.

L'optimisme des républicains tient en partie aux résultats d'une élection spéciale tenue il y a deux semaines dans une circonscription de Floride. Le scrutin avait pour but de combler un siège à la Chambre des représentants laissé vacant par le républicain Bill Young, mort l'automne dernier. Il mettait aux prises un candidat républicain jugé médiocre (David Jolly, lobbyiste de 40 ans) et une candidate démocrate mieux considérée (Alex Sink, femme d'affaires de 65 ans). Tout ça dans une circonscription qui oscille, ayant voté pour le démocrate Barack Obama en 2008 et 2012.

Or, à la surprise de plusieurs stratèges républicains, David Jolly a fini par battre Alex Sink, profitant notamment de l'aide des frères milliardaires David et Charles Koch. Par l'entremise de l'organisation Americans for Prosperity, les deux barons de la pétrochimie ont financé et diffusé plusieurs pubs négatives associant la candidate démocrate à la bête noire des républicains, l'Obamacare, dont les ratés sont bien connus.

Et les républicains pensent pouvoir répéter ce scénario en novembre prochain dans les États conservateurs où sont en jeu des sièges appartenant aujourd'hui à des sénateurs démocrates. Au moins sept États tombent dans cette catégorie, dont la Louisiane, le Montana, l'Alaska, la Caroline-du-Nord et la Virginie-Occidentale.

Des États où les frères Koch ont déjà dépensé environ 30 millions de dollars pour diffuser des pubs critiquant l'Obamacare de façon plus ou moins honnête selon les vérificateurs de faits des médias américains.

La confiance des républicains repose aussi sur la nature de l'électorat qui participe aux élections de mi-mandat. Cet électorat est plus blanc, plus âgé et plus républicain qu'il ne l'est aux élections présidentielles, un fait que Barack Obama a lui-même déploré la semaine dernière lors d'une activité de collecte de fonds en Floride.

«Aux élections de mi-mandat, nous nous faisons tabasser, ou bien parce que nous pensons que ce n'était pas important, ou bien parce que nous devenons tellement découragés par ce qui se passe à Washington que nous pensons que cela n'en vaut pas la peine», a-t-il déclaré.

En novembre 2010, lors de ses premières élections de mi-mandat à la Maison-Blanche, le président avait vu les démocrates subir une dégelée historique à la Chambre des représentants, où ils avaient perdu 63 sièges et leur majorité. Une dégelée provoquée en bonne partie par la réforme du système de santé adoptée au début de la même année. Quatre ans plus tard, les démocrates misent sur une stratégie inhabituelle pour se défendre. Ils ont convenu de cibler les frères Koch dans des discours et des pubs télévisées, les accusant de «tenter d'acheter l'Amérique».

«D'un bout à l'autre du pays, les candidats républicains au Sénat épousent un programme dangereux qui est bon pour des milliardaires comme les frères Koch et mauvais pour presque tous les autres dans le pays», a déclaré le Comité de campagne sénatoriale des démocrates la semaine dernière dans un communiqué.

Reste à voir si cette stratégie pourra contribuer à mettre les démocrates à l'abri d'un tsunami électoral en novembre. Peut-être devront-ils attendre à novembre 2016 pour faire perdre aux républicains leur sourire.