Douze policiers par kilomètre de frontière et des milliards de dollars d'équipements: c'est le remède imaginé par les élus américains pour tarir les flux de clandestins en provenance du Mexique, dans un texte qui a reçu le feu vert du Sénat lundi.

La réforme du système d'immigration américain entre dans sa phase finale dans la chambre haute du Congrès, où le volet sécurité a été implicitement validé lors d'un vote de procédure, par 67 voix contre 27, au-delà des 60 requises et avec l'appui notable de 15 républicains.

L'adoption de l'ensemble de la réforme aura lieu en fin de semaine au Sénat, selon le chef des démocrates, Harry Reid. Mais la Chambre des représentants, qui prendra ensuite le relais, est contrôlée par les adversaires républicains du président Barack Obama, dont certains sont fermement opposés aux régularisations massives de clandestins.

Les débats pourraient y durer encore des mois avant qu'une loi soit promulguée par Barack Obama, ce qui constituerait une réussite majeure de son second mandat.

L'objectif: augmenter le nombre de visas de travail, donner des papiers aux 11 millions de clandestins, en majorité mexicains, et leur permettre de demander la nationalité au bout d'une période transitoire d'au moins 13 ans.

En échange, les alliés démocrates du président ont concédé aux républicains un plan exceptionnel de fortification de la frontière pour garantir que ces régularisations seront les dernières.

Selon le compromis, les agents fédéraux passeraient d'environ 18 000 à 38 405 le long des 3200 km de la frontière, l'équivalent de 12 policiers par kilomètres. En 2002, ils n'étaient que 10 000.

Les parlementaires veulent aussi que 480 km de barrières antivéhicules soient convertis en hautes clôtures antipiétons, et que 80 km de nouvelles clôtures soient érigés, pour un total de 1120 km. Le fleuve Rio Grande représente en outre 2000 km de frontière naturelle, au Texas.

Et ils détaillent les nouveaux équipements que le gouvernement devra acquérir, avec un budget de 3,2 milliards de dollars: 4 drones, 40 hélicoptères, 30 navires, des milliers de détecteurs de mouvements thermiques, infrarouges ou sismiques, des centaines de caméras fixes et mobiles, des radars... qui s'ajouteront aux technologies déjà en place.

«On va militariser des centaines de communes»

Une autre mesure généraliserait un système informatique de vérification du statut des employés par les employeurs, ce qui couperait du marché du travail les 40% de clandestins arrivés légalement sur le territoire, mais restés au-delà de la date limite de leurs visas.

«On aura des yeux dans le ciel, drones et avions», a résumé le démocrate Chuck Schumer, un des architectes de la réforme. «Toute personne qui tentera de traverser la frontière sera détectée, le jour ou la nuit, qu'il pleuve ou qu'il vente».

«C'est cher», a-t-il admis, mais c'est selon lui le prix pour rassurer les Américains.

À Washington, la comparaison est déjà faite avec le «surge», le terme qui avait décrit les renforts militaires envoyés par George W. Bush en Irak en 2007.

«C'est une référence militaire qui a du sens, car on va militariser des centaines de communes américaines», a relevé le démocrate Patrick Leahy.

Mais le déluge d'investissements était le prix politique pour obtenir le soutien de nombreux républicains, sur un dossier politiquement délicat.

«C'est vraiment de la politique, et cela n'a rien à voir avec ce qui se passe sur le terrain», explique à l'AFP Doris Meissner, experte au Migration Policy Institute. Jamais le nombre de passages clandestins n'a été aussi bas depuis 40 ans, rappelle-t-elle, notamment grâce aux investissements réalisés depuis le 11 septembre 2001.

Les auteurs du texte en conviennent: le républicain Bob Corker a lui-même admis qu'ils en avaient peut-être fait «un peu trop».

«On va militariser des centaines de communes»

«Est-ce plus que ce que j'aurais recommandé? Honnêtement, oui», a reconnu le républicain John McCain, promoteur de la réforme. «Mais il faut qu'on donne confiance aux gens».

À Washington, la comparaison est déjà faite avec le «surge», le terme qui avait décrit les renforts militaires envoyés par George W. Bush en Irak en 2007.

«C'est une référence militaire qui a du sens, car on va militariser des centaines de communes américaines», a relevé le démocrate Patrick Leahy. Le texte «ressemble à une liste de Noël pour Halliburton», a-t-il ironisé, en référence au grand fournisseur de la défense américaine.

Mais le déluge d'investissements était la condition de nombreux républicains pour se joindre aux 54 sénateurs démocrates, qui rêvent d'une majorité écrasante de 70 voix sur 100.

«C'est vraiment de la politique, et cela n'a rien à voir avec ce qui se passe sur le terrain», explique à l'AFP Doris Meissner, experte au Migration Policy Institute. Jamais le nombre de passages clandestins n'a été aussi bas depuis 40 ans, rappelle-t-elle, notamment grâce aux investissements réalisés depuis le 11 septembre 2001.

Une autre mesure généraliserait un système informatique de vérification du statut des employés par les employeurs, ce qui couperait du marché du travail les 40% de clandestins arrivés légalement sur le territoire, mais restés au-delà de la date limite accordée par leurs visas.

«On se concentre sur un levier certes très visible, mais qui n'est peut-être pas aussi efficace que d'autres outils, notamment les vérifications chez les employeurs», critique Henry Willis, du centre de réflexion Rand.

Les auteurs du texte en conviennent: le républicain Bob Corker a lui-même admis qu'ils en avaient peut-être fait «un peu trop».

PHOTO ERIC THAYER, REUTERS

Des Mexicains traversent clandestinement la frontière américaine.