Des élus américains habilités ont visionné jeudi à huis clos un montage vidéo de plusieurs caméras qui ont filmé le complexe diplomatique américain de Benghazi en Libye, pendant les longues heures de l'attaque meurtrière du 11 septembre par des miliciens islamistes.

Le Congrès américain avait convoqué de hauts responsables du gouvernement pour faire la lumière sur cet assaut, lors duquel l'ambassadeur Christopher Stevens et trois autres Américains ont été tués, une affaire politisée qui a pris la tournure d'un bras de fer entre Barack Obama et les républicains.

Le film «est en temps réel, il commence avant le début de l'incident et continue pendant tout l'incident, et l'exode», a décrit Dianne Feinstein, présidente de la commission du Renseignement du Sénat, à l'issue d'une longue audition à laquelle ont participé de hauts responsables du renseignement, dont le directeur par intérim de la CIA, Michael Morrell.

Le patron de la centrale américaine du renseignement au moment de l'attaque, David Petraeus, a démissionné vendredi à la suite d'une liaison extraconjugale, mais il se rendra finalement en personne devant les élus du Congrès, tôt vendredi matin et toujours à huis clos.

«Le général Petraeus est allé à Tripoli, il s'est entretenu avec beaucoup de gens qui ont été impliqués. Il est donc très important de pouvoir connaître son point de vue», a expliqué Mme Feinstein.

M. Petraeus s'était rendu en Libye après l'attaque pour mener sa propre enquête, mais il sera aussi interrogé sur la façon dont la CIA a géré la situation pendant la nuit du 11 au 12 septembre pour venir en aide aux Américains assiégés.

«Nous savons que des erreurs ont été commises, et nous devons en tirer les leçons», a affirmé le sénateur républicain Saxby Chambliss.

Deux autres auditions à huis clos auront lieu au Sénat avant une audition publique lors de laquelle les élus publieront les conclusions de leur enquête.

«Incompétence colossale»

La secrétaire d'État, Hillary Clinton, actuellement en voyage, participera aussi à des auditions parlementaires en décembre, où elle fera part des résultats de l'enquête interne au département d'État.

Les républicains accusent le gouvernement Obama d'avoir mal géré l'affaire, qualifiant la gestion de l'attaque de passive, incompétente voire cynique.

«Soit ce président et cette administration sont coupables d'incompétence colossale, soit ils se sont lancés dans une entreprise de dissimulation, mais dans les deux cas c'est inacceptable pour les Américains», a lancé mercredi le sénateur John McCain.

Jeudi, l'ancien rival de Barack Obama en 2008 a enfoncé le clou, rappelant dans un entretien télévisé que le consulat avait déjà été attaqué deux fois par explosifs, en avril et en juin.

Le mois dernier, deux ex-responsables de la sécurité des postes diplomatiques en Libye avaient admis devant le Congrès que le niveau de sûreté à Benghazi était insuffisant, et qu'Al-Qaïda augmentait sa présence dans la zone.

M. Obama a vertement répondu aux critiques mercredi en affirmant avoir «donné des ordres à mon équipe de sécurité nationale pour que tout soit fait pour assurer leur sécurité».

Les flèches des républicains visent surtout l'ambassadrice aux Nations Unies, Susan Rice qui avait affirmé cinq jours après l'attaque qu'il s'agissait d'une manifestation contre une vidéo islamophobe ayant dégénéré --ce qui, selon le président, correspondait aux informations disponibles à l'époque.

Les républicains interprètent ces premières déclarations comme une volonté d'étouffer le caractère terroriste de l'assaut en pleine campagne présidentielle, ce qui aurait pu ternir le bilan d'Obama dans le combat contre Al-Qaïda.