Le procès de l'ex-candidat à la primaire présidentielle démocrate de 2008 John Edwards, poursuivi pour avoir détourné des fonds de campagne afin d'entretenir une maîtresse, s'est ouvert lundi devant un tribunal fédéral de Caroline du Nord.

À 58 ans, celui qui fut aussi colistier du candidat démocrate à la Maison-Blanche John Kerry en 2004, est poursuivi pour six chefs d'accusation --dont ceux de complot en vue de violer les lois de financement des campagnes, malversations et fausses déclarations-- pour avoir utilisé des fonds de campagne afin de couvrir une liaison.

Les accusations portent sur près d'un million de dollars provenant de deux riches donateurs, que M. Edwards aurait utilisé pour loger sa maîtresse, Rielle Hunter, vidéaste et membre de son équipe de campagne, avec qui il a eu un enfant.

L'argent provenait d'un riche avocat texan, Fred Baron, mort en 2008, et de Rachel Mellon, aujourd'hui 101 ans, veuve du banquier Paul Mellon.

L'affaire repose en grande partie sur le témoignage d'Andrew Young, proche collaborateur de John Edwards à l'époque, et qui avait dans un premier temps affirmé être le père de l'enfant afin que ce dernier puisse poursuivre sa campagne contre Barack Obama et Hillary Clinton.

A la barre lundi, Andrew Young a témoigné de son admiration pour l'ancienne étoile montante du parti démocrate, tout en décrivant les mouvements d'argent.

Il a raconté que Rachel Mellon voyait en John Edwards un héritier spirituel de John F. Kennedy. «Elle pensait qu'il pouvait sauver l'Amérique», a décrit M. Young. «Elle a demandé: comment puis-je aider?»

Selon les procureurs, cette aide s'est matérialisée sous la forme de chèques à des personnes tiers qui remettaient ensuite de l'argent liquide à M. Young.

Mais la crédibilité de ce témoin est entachée par deux arrestations pour un accident de voiture en 1997 et une conduite en état d'ivresse en 2006. Il a aussi appelé récemment plusieurs autres témoins du procès, ce qui peut représenter une infraction.

Le procureur David Harbach a déclaré que «l'image de père de famille de M. Edwards était cruciale pour sa campagne» et qu'il «aurait fait n'importe quoi pour maintenir ses chances de devenir président», insistant: «(John) Edwards a fait ce qu'il a toujours fait: nier, tromper, manipuler».

Les avocats de l'ancien candidat affirment que les contributions reçues par leur client étaient des cadeaux offerts à titre personnel par de riches amis afin de cacher sa liaison extra-conjugale, et qu'elles n'avaient aucun lien avec la campagne présidentielle.

John Edwards, qui a dû quitter la vie politique après la révélation de son aventure, affirme «ne pas avoir violé la loi» et a plaidé non coupable.

Lundi, son avocate Allison Van Laningham a déclaré que son client était «tombé en disgrâce aux yeux du grand public, de façon humiliante», avant d'assurer que «les preuves montreront qu'il n'avait pas d'intentions criminelles».

A cette époque, l'ancien sénateur était marié à son amour de lycée, Elizabeth Edwards, avec qui il a eu quatre enfants, dont un décédé dans un tragique accident de la route en 1996.

De l'extérieur, cette situation avait tout l'air de celle d'une famille modèle. Si modèle qu'en 2007 une organisation de charité avait décerné à John Edwards la récompense de «Père de l'Année».

Très appréciée des Américains, l'ex-épouse de John Edwards s'était encore plus attirée leurs sympathies lorsqu'ils avaient découvert qu'elle luttait contre le cancer en même temps qu'elle affrontait les infidélités de son mari. Elle l'a finalement quitté en 2010 au moment où il avait reconnu être le père de la fille de Rielle Hunter, avant de s'éteindre quelques mois plus tard.

S'il est reconnu coupable, John Edwards encourt jusqu'à cinq ans de prison pour chacun des six chefs d'accusation et 250 000 dollars d'amende.