Des centaines de musulmans ont prié dans un parc de Manhattan et ont marché vers le quartier général de la police de New York, vendredi, pour protester contre l'infiltration de la police dans les mosquées et l'espionnage des communautés musulmanes depuis les attentats du 11 septembre 2001.

Vêtus de manteaux d'hiver, des hommes et des femmes se sont agenouillés au moment où l'appel à la prière a résonné sur les murs des édifices gouvernementaux entourant le parc.

«Le fait que nous soyons musulmans n'annule pas notre nationalité», a dit l'imam Talib Abdur-Rashid à la foule de quelque 500 personnes rassemblée sur la place Foley, près de l'hôtel de ville de New York. «Nous sommes à la fois musulmans et Américains.»

Le rassemblement était moins imposant et plus discipliné que celui des manifestants du mouvement «Occupy Wall Street» la veille. Les policiers qui surveillaient la place ne portaient pas de tenue antiémeute et les manifestants ont plaidé en faveur de l'amélioration des relations avec la police.

«Nous voulons que vous nous respectiez et nous vous respecterons», a dit l'imam Abdur-Rashid.

Il s'agissait de la première manifestation organisée contre les tactiques de renseignement du service de police de New York (NYPD) depuis qu'une enquête de l'Associated Press a révélé l'existence d'un programme d'espionnage étendu visant à documenter tous les aspects de la vie des musulmans à New York. La police a infiltré les mosquées et les associations étudiantes. Des agents en civil ont recensé les restaurants moyen-orientaux et leur clientèle. Des analystes ont établi des bases de données sur les chauffeurs de taxi arabes et ont surveillé les musulmans qui ont changé de nom.

«Si cela était arrivé à n'importe quel autre groupe religieux, tous les Américains auraient été outrés», a dit Daoud Ibraheem, un artiste graphique à la retraite âgé de 73 ans qui vit à Brooklyn.

Après la prière, les manifestants, rejoints par une cinquantaine de militants du mouvement «Occupy Wall Street», se sont dirigés vers le quartier général de la police. Ils y sont restés brièvement à scander des slogans demandant la démission du chef de la police, avant de retourner sur la place Foley.

Les manifestants ont brandi des pancartes où l'on pouvait lire: «Le NYPD nous surveille. Qui surveille le NYPD?». Une dizaine de policiers en uniforme ont encadré le rassemblement et la marche, mais il n'y a pas eu d'affrontement.

Lors d'une conférence de presse sur un autre sujet, le chef de la police de New York, Ray Kelly, a «catégoriquement» nié que le NYPD ait espionné les musulmans à New York.

«Nous faisons ce que nous croyons nécessaire pour protéger cette ville, conformément à la loi», a dit M. Kelly. «Nous avons une panoplie d'avocats très expérimentés et bien formés qui nous ont conseillé sur toutes nos tactiques et nos opérations.»

L'enquête menée par l'Associated Press a montré que M. Kelly et son chef du renseignement, Daid Cohen, ont transformé le NYPD en l'une des agences de renseignement intérieur les plus actives des États-Unis. Le NYPD mène des opérations bien au-delà des limites de la ville et son budget lui donne des capacités que même les agences fédérales n'ont pas. Certaines tactiques utilisées par la police de New York ne seraient pas permises au sein du FBI à cause des exigences sur le respect des libertés civiles.

«Les États-Unis sont censés être un pays qui protège les libertés», a commenté Yusuf Ali Muhammed, un manifestant du Bronx qui portait une tenue traditionnelle. «Mais les États-Unis (sont dirigés) par un gouvernement hypocrite, un gouvernement qui pense qu'il peut faire ce qu'il veut sans que personne ne s'y objecte.»