L'explosion d'un premier réacteur nucléaire, la semaine dernière, a poussé Hideto Hendo à coller du ruban adhésif autour de ses fenêtres. Puis il s'est mis à porter un masque de chirurgien. Hier, il est sorti de chez lui, pour la première fois, et s'est rendu à Koriyama pour subir un test de radiation.

Sa crainte s'est dissipée. Un employé vêtu d'une combinaison en microfibre a placé une sonde près de sa tête, son corps, ses chaussures. L'écran numérique a indiqué la présence de 400 cpm (counts per minute) de radiation, un niveau légèrement plus élevé qu'en temps normal, mais en deçà des doses dangereuses qui requièrent une décontamination, selon les experts du gouvernement japonais.

«Ce soir, je vais dormir, dit l'homme de 26 ans, sa fiche avec les résultats du test entre les mains. Je vais dire à tous mes amis de venir se faire tester.»

Environ 263 répliques sismiques d'une magnitude équivalente ou supérieure à 5,0 ont frappé le Japon depuis une semaine. Les Japonais en parlent à peine: ce qui les inquiète, ce sont les radiations.

M. Hendo habite à Fukushima, à 60 kilomètres de la centrale Fukushima Daiichi, bien en dehors du périmètre de 30 kilomètres où des évacuations et des mises en garde ont eu lieu.

Pour les citoyens inquiets, par contre, les kilomètres et les zones ne veulent rien dire. Quelque part au-delà des collines, une centrale nucléaire émet de la fumée radioactive. Difficile de ne pas craindre pour sa sécurité.

Jeudi, le directeur de Tokyo Electric Power (TEPCO), Akio Komori, a fondu en larmes en conférence de presse lorsqu'il a admis que la fuite à la centrale était assez sérieuse pour causer des décès.

Dans le nord du Japon, des milliers de personnes ont volontairement quitté leur maison pour trouver refuge dans des salles municipales. À Koriyama, à 70 kilomètres à l'ouest de la centrale nucléaire, l'air est constamment surveillé et jugé sûr. Quelque 4121 personnes évacuées ont trouvé refuge dans les centres d'urgence de la ville.

Le scepticisme envers TEPCO, propriétaire de la centrale nucléaire, est répandu. «Nous habitons à l'extérieur du périmètre, mais nous sommes partis quand même, explique Koichi Yamaguchi, qui est venue à Koriyama avec son mari et son fils. La situation change trop rapidement pour que l'on reste simplement à attendre à la maison», dit-elle.

Rarement problématique

Pour subir un véritable test, de la tête aux pieds, il faut se rendre dans un gymnase d'une école désaffectée de Koriyama.

De longs tapis verts en caoutchouc synthétique recouvrent les corridors qui mènent au gymnase, et seront plus tard retirés et brûlés.

Une vingtaine d'employés vêtus d'une combinaison blanche en microfibre, de couvre-bottes et d'un masque testent les citoyens avant que ceux-ci ne soient admis dans les centres de réfugiés. Les employés portent tous un dosimètre, appareil qui enregistre les radiations auxquelles ils sont exposés.

Des milliers de citoyens ont été testés depuis une semaine. Selon un des responsables du centre, Takahashi Kozuma, environ 1 ou 2% des citoyens testés ont des niveaux dangereux de matériel radioactif sur eux. Ils doivent aussitôt jeter leurs vêtements et prendre une douche dans les vestiaires du gymnase.

«Les manteaux et les chaussures sont souvent plus contaminés que les autres vêtements, dit-il. La radioactivité se retrouve dans la pluie ou dans la neige. Les manteaux et les chaussures sont donc affectés, mais très rarement à des niveaux problématiques.»

Les personnes les plus à risque sont celles qui habitaient ou travaillaient dans un rayon de 30 kilomètres de la centrale, dit-il. Les citoyens des régions plus éloignées n'ont pas reçu de doses préoccupantes.

Critiques

Des officiels ont commencé à critiquer ce mouvement de réfugiés préventifs, indiquant que 370 000 personnes étaient déjà déplacées ou sans logis dans le nord-est du Japon.

Des tests effectués par le gouvernement américain ont décelé la présence de contaminants radioactifs dans la zone d'exclusion, hier. Selon l'Organisation mondiale de la santé, les niveaux de radiation détectés en dehors du périmètre ne constituent pas une menace à la santé.

Parallèlement aux efforts du gouvernement, de nouveaux sites internet qui affichent les niveaux de radioactivité sont mis en ligne chaque jour au Japon. Des amateurs de science ont même ouvert une page Facebook sur laquelle les gens qui possèdent un détecteur de radiation publient leurs données. Leurs trouvailles sont rassurantes: l'air des grandes villes ne pose pas danger jusqu'ici au Japon.