Israël devait expulser rapidement tous les membres du cargo irlandais arraisonné Rachel Corrie, dont le prix Nobel de la paix Mairead Maguire, alors qu'il était pressé dimanche d'accepter une enquête internationale sur son raid meurtrier contre une flottille humanitaire.

«Toutes les personnes à bord du bateau seront expulsées dimanche après avoir signé un document par lequel elles renoncent à recourir à la justice israélienne contre cette mesure», a déclaré à l'AFP une porte-parole du service de l'immigration israélien, Sabine Haddad.

Le cargo de 1 200 tonnes transportait onze passagers, cinq Irlandais et six Malaisiens, et huit membres d'équipage (six Philippins, un Cubain et le capitaine écossais).

Le Cubain et les six Malaisiens - le député Mohd Nizar Zakaria, deux journalistes de la télévision malaysienne TV3 et trois employés de l'ONG malaysienne Perdana Global Peace - sont arrivés en Jordanie via le point de passage frontalier du pont Allenby.

Les 12 derniers devaient être rapatriés par avion dans les prochaines heures. Mairead Maguire, une Nord-irlandaise de 66 ans, célèbre avocate de la cause palestinienne, et ses camarades devaient quitter Israël tôt lundi et sont attendus à Dublin en fin de matinée. Tenus à l'écart, dans une partie séparée de l'aéroport, ils étaient injoignables par téléphone.

Leur départ a été retardé en raison de leur refus initial de signer une décharge dans laquelle ils renonçaient à contester leur expulsion auprès de la justice, selon la porte-parole de l'immigration.

Leur rapatriement survient au lendemain de l'abordage sans violences du Rachel Corrie dans les eaux internationales au large d'Israël, qui a contrasté avec l'assaut meurtrier lancé le 31 mai contre le ferry turc Mavi Marmara, «navire amiral» d'une flottille humanitaire internationale.

Ce dénouement pacifique n'a pas atténué la vague d'indignation internationale déclenchée par la mort de neuf activistes tués par balles lors des affrontements avec les soldats israéliens sur le Mavi Marmara, ni la pression sur Israël pour accepter une enquête internationale indépendante.

En visite à Chypre, le pape Benoît XVI a renouvelé dimanche son appel pour la paix au Proche-Orient, réclamant un effort international «urgent» pour éviter «de plus grandes tragédies».

Le cabinet israélien de sécurité devait se réunir dans la soirée pour examiner les moyens de répondre aux critiques internationales.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a contacté le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu pour évoquer la mise en place d'une commission d'enquête internationale, selon une source gouvernementale israélienne citée par les quotidiens dominicaux.

M. Ban aurait mentionné le nom de l'ex-premier ministre néo-zélandais Geoffrey Palmer pour présider une telle commission qui inclurait des représentants des États-Unis, de Turquie et d'Israël.

«Israël et les États-Unis sont en contact au plus haut niveau» à ce sujet, a indiqué à l'AFP un haut responsable gouvernemental israélien sous couvert de l'anonymat.

Les dirigeants israéliens sont divisés sur l'opportunité d'une enquête internationale, la plupart préférant une investigation interne sur les ratés de l'abordage.

Le gouvernement israélien, de plus en plus isolé sur la scène internationale, pourrait aussi être contraint de lever le blocus de Gaza imposé depuis quatre ans, selon les médias israéliens.

Des responsables du ministère de la Défense envisagent de laisser passer des bateaux d'aide humanitaire à condition qu'ils soient inspectés par une force internationale, possiblement onusienne, rapporte le Jerusalem Post.

Toutefois, M. Netanyahu a répété dimanche qu'Israël «ne permettrait pas la création d'un +port iranien+ à Gaza et l'entrée libre d'armes dans ce territoire», en référence au soutien de Téhéran au mouvement islamiste palestinien Hamas, qui contrôle la bande de Gaza.

Les faucons du gouvernement israélien ont également exprimé leurs réticences face à ces inspections. «On peut en parler, mais je ne pense pas que ce soit une bonne idée», a estimé le ministre des Finances Youval Steinitz.

Dans une interview à l'AFP, le secrétaire général adjoint de l'ONU chargé des affaires humanitaires, John Holmes, a estimé que la tragédie devait être l'occasion de «convaincre Israël de changer de politique» et lever le blocus de Gaza.

Le mouvement Free Gaza («Liberté pour Gaza»), à l'initiative de l'envoi de la «Flottille de la liberté», a déjà annoncé une nouvelle tentative de briser le blocus maritime «dans les deux prochains mois». «Nous reviendrons», promet un communiqué.

La bande de Gaza, un territoire de 362 km2, bordée par la mer, Israël et l'Égypte où s'entassent 1,5 million de Palestiniens, est soumise à un strict embargo israélien, renforcé en juin 2007 après la prise du pouvoir par la force du Hamas.