Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a averti samedi que malgré l'accord sur le nucléaire conclu avec les grandes puissances, son pays poursuivrait sa politique face aux États-Unis et son soutien à ses «amis» dans la région.

«Notre politique ne changera pas face au gouvernement arrogant américain», a déclaré M. Khamenei, quatre jours après la conclusion d'un accord sur le programme nucléaire iranien.

Ses propos ont été accueillis par les traditionnels «mort à l'Amérique» et «mort à Israël» lancés par les fidèles rassemblés dans le centre de Téhéran à l'occasion de la prière pour l'Aïd el-Fitr, marquant la fin du jeûne musulman du ramadan.

«Les politiques des États-Unis dans la région sont opposées à 180 degrés à celles de la République islamique d'Iran», a-t-il dit. «Nous n'avons aucun dialogue avec les États-Unis sur les questions internationales, régionales ou bilatérales. Quelquefois, comme dans le cas nucléaire, nous avons négocié avec les États-Unis sur la base de nos intérêts», a-t-il encore souligné.

Un peu plus tard, il a ajouté devant les responsables politiques et militaires du pays que «l'Iran ne faisait pas confiance aux États-Unis, car les politiciens américains ne sont pas sincères».

L'Iran et les puissances du groupe 5+1 (États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie, Chine et Allemagne) ont conclu le 14 juillet, après 22 mois d'intenses négociations, un accord final. Il vise à rendre quasiment impossible la possibilité pour l'Iran de fabriquer une bombe atomique, tout en lui assurant le droit de développer une filière nucléaire civile.

Le président américain, Barack Obama, a réfuté samedi les critiques, notamment au Congrès, en affirmant que sans cet accord historique, il y avait le risque d'une «autre guerre dans cette région (...) volatile».

Dans son discours, le numéro un iranien a salué le travail accompli par les négociateurs nucléaires qui «ont travaillé durement», tout en insistant à plusieurs reprises sur le fait que le texte doit encore être entériné légalement. Le Parlement iranien et le Congrès américain doivent en effet approuver l'accord.

Une résolution doit en outre être adoptée lundi par le Conseil de sécurité de l'ONU pour entériner le texte, qui prévoit aussi l'interdiction de toute activité liée aux missiles balistiques à capacité nucléaire pendant huit ans.

Pour la première fois, un haut responsable militaire iranien, le général Mohammad Ali Jafari, chef des Gardiens de la révolution, a évoqué des «inquiétudes, en particulier à propos de la résolution» du Conseil de sécurité, sans plus de détails.

Plusieurs responsables iraniens ont en effet déclaré que l'Iran n'accepterait aucune restriction concernant son programme balistique.

Arme atomique interdite par le Coran

M. Khamenei a par ailleurs souligné que l'accord nucléaire ne changerait pas la politique de l'Iran au niveau régional. «La République islamique d'Iran ne renoncera pas à soutenir ses amis dans la région, les peuples opprimés de Palestine, du Yémen, les peuples et gouvernements syriens et irakiens, le peuple opprimé de Bahreïn et les combattants sincères de la résistance au Liban et en Palestine», a-t-il dit.

L'Iran soutient les gouvernements irakien et syrien, en envoyant des conseillers militaires sur place pour combattre notamment les jihadistes de l'organisation État islamique (EI) qui ont pris de larges territoires dans ces deux pays.

Téhéran soutient aussi les rebelles houthis au Yémen, combattus par l'Arabie Saoudite, l'opposition chiite à Bahreïn contre la dynastie sunnite au pouvoir, ou encore le Hezbollah libanais et les groupes islamistes palestiniens (Hamas et Jihad islamique).

Israël a dénoncé l'accord comme une «erreur historique» et l'Arabie saoudite l'a également critiqué. Le secrétaire américain à la Défense, Ashton Carter, doit d'ailleurs se rendre la semaine prochaine chez ces deux alliés des États-Unis.

Le numéro un iranien, qui est aussi le chef des forces armées, a également souligné la détermination de son pays à préserver ses «capacités militaires et défensives», soulignant que Téhéran «n'acceptera jamais les demandes excessives».

Mais il a une nouvelle fois insisté sur l'interdiction des armes atomiques par la religion.

«Par ordre du Coran et de la charia islamique (loi islamique), nous considérons la production, la possession et l'usage de l'arme atomique haram (interdite par la religion) et cela n'a rien à voir avec les négociations», a déclaré l'ayatollah Khamenei, qui a émis dans le passé une fatwa contre toute utilisation de telles armes.