Durement ébranlées par le retour à l'avant-scène de la controverse autour des courriels de l'ancienne secrétaire d'État, Hillary Clinton et son équipe ont attaqué hier l'homme par lequel cette mauvaise surprise est arrivée, le directeur du FBI James Comey. Pour leur part, Donald Trump et ses alliés républicains, comblés par cette tempête parfaite, se sont remis à croire en leurs chances de reconquérir la Maison-Blanche et de limiter leurs pertes au Congrès.

Prenant la parole lors d'un rassemblement électoral en Floride, la candidate démocrate à la présidence a qualifié de « profondément troublante » la décision du patron de la police fédérale de rouvrir l'enquête sur ses courriels à moins de deux semaines du scrutin présidentiel.

« Si vous êtes comme moi, vous vous posez probablement quelques questions à ce sujet. C'est très étrange de sortir quelque chose comme ça avec si peu d'information juste avant une élection », a-t-elle déclaré en faisant allusion à la lettre par laquelle James Comey a informé vendredi le Congrès de la découverte de nouveaux courriels semblant « pertinents » relativement à l'enquête du FBI sur la messagerie personnelle de l'ancienne chef de la diplomatie américaine.

« Ce n'est pas seulement étrange. C'est sans précédent, et c'est profondément troublant. Les électeurs méritent d'avoir tous les faits. »

Les médias américains, en s'appuyant sur des sources anonymes, ont fourni quelques faits depuis vendredi. La nouvelle démarche du FBI découle d'une enquête sur les échanges de « sextos » présumés d'Anthony Weiner, mari d'Huma Abedin, proche collaboratrice de Clinton, avec une adolescente de Caroline du Nord âgée de 15 ans. Les enquêteurs ont saisi un ordinateur utilisé par le couple aujourd'hui séparé dans lequel se trouvaient des milliers de courriels d'Abedin.

Dans sa lettre au Congrès, le directeur du FBI a indiqué que ses enquêteurs tenteront de déterminer si ces courriels contenaient des informations classifiées. Il a précisé qu'il ne connaissait ni le contenu ni l'importance de ces courriels.

Les médias américains ont également révélé hier que James Comey avait envoyé sa lettre au Congrès malgré l'opposition de hauts responsables du ministère de la Justice. Ceux-ci estimaient qu'une telle démarche contrevenait à la pratique du FBI de ne pas commenter une enquête en cours et de ne pas agir d'une façon susceptible d'influencer l'issue d'une élection.

Le directeur de campagne de Clinton, Robby Mook, a attaqué James Comey sur cet aspect.

« La pratique bien établie du ministère de la Justice est la suivante : ne faites rien qui puisse être vu comme une tentative d'influencer une élection. C'est complètement injuste pour Mme Clinton et c'est vraiment injuste pour les électeurs », a-t-il déclaré.

UN NOUVEL ÉLAN À LA CAMPAGNE DE TRUMP

L'annonce surprise de James Comey est intervenue au moment où la plupart des sondages et des experts prédisaient une victoire relativement facile à Hillary Clinton le 8 novembre. Elle a cependant remis en question ces prédictions et donné un nouvel élan à la campagne de Donald Trump, qui n'a pas fait dans la dentelle hier en s'exprimant sur le sujet.

« Comme vous le savez, on a annoncé hier que le FBI avait rouvert son enquête sur la conduite illégale et criminelle d'Hillary Clinton », a-t-il déclaré lors d'un rassemblement au Colorado.

En entendant ces paroles, les partisans du candidat républicain se sont aussitôt mis à scander leur slogan préféré : « Enfermez-la ! Enfermez-la ! »

Quelques instants plus tard, le magnat de l'immobilier a poursuivi : « C'est le plus gros scandale politique depuis le Watergate. Et c'est l'espoir le plus profond de chacun que la justice, enfin, soit rendue de façon adéquate ».

« Hillary n'a personne d'autre à blâmer qu'elle-même pour ses problèmes juridiques. Son action criminelle était intentionnelle et délibérée. »

Malgré les attaques dont il a fait l'objet, et qui ne venaient pas seulement de partisans démocrates, James Comey est resté muet hier. La veille, il avait fait part de sa crainte que sa démarche soit « mal comprise » dans une lettre aux employés du FBI.

Certains de ses critiques admettent qu'il faisait face à un dilemme de taille. En gardant le silence sur la découverte de ses enquêteurs, il aurait risqué d'être accusé de camouflage par des républicains qui lui reprochent déjà d'avoir recommandé de ne pas poursuivre Clinton au sujet de ses courriels.

Ce républicain nommé à son poste actuel par Barack Obama a évidemment choisi l'option qui lui vaut aujourd'hui d'être accusé de faire le jeu de Donald Trump.