C'était la première fois que Dominique Strauss-Kahn faisait entendre sa voix en public depuis son arrestation le 14 mai.

«Non coupable», a déclaré l'ancien patron du Fonds monétaire international, vêtu d'un complet sombre, les traits tirés et la voix à peine audible.

Le juge Michael Obus venait de lui demander comment il entendait répondre aux sept chefs d'accusation retenus contre lui.

«Vous savez que, si vous plaidez non coupable, vous vous engagez à être présent à toutes les audiences du procès», a-t-il dit à l'ancien ministre français, dont la femme, Anne Sinclair, était assise au premier rang d'une salle d'audience bondée de journalistes.

Quelques minutes auparavant, d'autres voix, venues de la rue, étaient montées jusqu'au 12e étage du tribunal pénal de Manhattan, faisant entendre un autre son de cloche: «Honte à vous! Honte à vous!», répétaient-elles.

Une centaine d'employées d'hôtel habillées en femmes de ménage, profession de la victime présumée, étaient venues manifester leur solidarité pour leur consoeur. Elles avaient scandé le même message pour accueillir DSK à son arrivée au tribunal, et l'ont repris à son départ.

L'audience n'aura duré que sept minutes, le temps de lire l'acte d'accusation, d'entendre la réponse de DSK et de s'entendre sur la date de la prochaine audience, qui a été fixée au 18 juillet.

Dominique Strauss-Kahn est passible d'un maximum de 25 ans de prison s'il est reconnu coupable. Il est notamment accusé d'agression sexuelle, de tentative de viol, d'attouchements non consentis et de séquestration.

Il pourrait s'écouler plusieurs mois, ponctués d'une série d'audiences préliminaires, avant le début du procès, si Dominique Strauss-Kahn ne décide pas d'ici là de plaider coupable en échange d'une peine réduite ou d'une libération conditionnelle.

En attendant, l'avocat new-yorkais de Dominique Strauss-Kahn a affirmé que le choix de son client de plaider non coupable devant le juge Obus constituait «une déclaration forte et éloquente».

«Lorsque les preuves seront produites, il apparaîtra clairement qu'il n'y a pas d'élément fort montrant qu'il y a eu contrainte dans cette affaire. Toute suggestion du contraire n'est tout simplement pas crédible», a déclaré Benjamin Brafman aux journalistes.

La victime présumée, d'origine guinéenne et âgée de 32 ans, est femme de chambre à l'hôtel Sofitel à New York. Elle n'était pas présente hier lors de la comparution de DSK. Un de ses avocats, Kenneth Thompson, a cependant assuré qu'elle était prête à témoigner en cour contre son agresseur présumé.

«La victime souhaite que vous sachiez que le pouvoir, l'argent et l'influence de Dominique Strauss-Kahn ne pourront empêcher que la vérité éclate sur ce qu'il a fait dans cette chambre d'hôtel.»

Celle que l'on appelle Ophelia dispose d'un an après les faits pour engager une action en dommages et intérêts contre l'ex-patron du FMI. Le choix de ses avocats laisse croire que la plaignante n'écarte pas cette avenue, qui lui permettrait d'obtenir un dédommagement pour le crime dont elle dit avoir été victime. Après avoir retenu les services de Jeffrey Shapiro, Ophelia a embauché deux autres avocats de droit civil, Kenneth Thompson et Norman Siegel. Thompson, Afro-Américain diplômé de l'Université de New York, s'est fait un nom et une réputation à l'époque où il était procureur fédéral. Dans ce rôle, il a notamment obtenu un verdict de culpabilité contre le policier accusé d'avoir brutalisé Abner Louima, immigré d'origine haïtienne, dans un poste de police de Brooklyn, à la fin des années 90.