Le directeur général du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn, qui voit sa carrière compromise par une retentissante affaire d'agression sexuelle, est «victime d'un complot».

C'est du moins ce que pense une majorité de Français selon un nouveau sondage de la firme CSA produit dans les jours suivants l'annonce de son arrestation.

Ainsi, 57% des personnes interrogées adhèrent à cette thèse. Chez les sympathisants socialistes, qui voyaient en DSK leur plus grand espoir pour l'élection présidentielle de 2012, le résultat est de 70%.

Le scepticisme de la population envers l'inculpation de l'ancien ministre socialiste est alimenté notamment par les sorties d'intellectuels de renom, qui plaident lourdement la cause de l'administrateur du FMI.

Bernard-Henri Lévy, dans un long texte sur son blogue, s'insurge contre la manière dont son ami de longue date est dépeint, arguant qu'il ne ressemble en rien «à la bête insatiable et maléfique, à l'homme des cavernes que l'on nous décrit un peu partout».

Il s'attriste que la femme de DSK, Anne Sinclair, «admirable d'amour et de courage», soit elle aussi «exposée aux salaceries de l'opinion publique» et demande comment il est possible que la femme de chambre ait pu se retrouver seule «dans la chambre de l'une des personnes les plus surveillées de la planète».

«Mise à mort médiatique»

Jean Daniel, du Nouvel Observateur, dénonce la «mise à mort médiatique» de l'accusé et le «renoncement» à la présomption d'innocence alors que les preuves à son encontre n'ont pas été présentées.

Lui aussi semble plus que sceptique sur le bien-fondé de l'affaire. «Supposons, oui, j'accepte cette supposition, que DSK soit réellement l'auteur de ce dont la femme de chambre l'accuse, dans ce cas-là elle serait la victime et il ne faudrait pas l'oublier», concède-t-il.

Ces propos font écho à ceux de plusieurs élus proches de l'ex-ministre, qui affirment que l'homme de 62 ans n'a pas le profil d'un violeur, suggérant du même coup que la plainte est une fabrication.

Et la victime?

Depuis quelques jours, des voix s'élèvent pour dénoncer le manque de considération manifesté envers la victime présumée de l'affaire.

La directrice adjointe de la rédaction de Libération, Béatrice Vallaeys, a dénoncé mardi dans une lettre ouverte ceux qui répètent que «ce n'est pas le style de Dominique d'agresser physiquement une femme». «Une formule particulièrement sotte, quand elle n'est pas dégradante pour celle qui, en l'état du dossier d'accusation américain, semble bien victime d'une agression sexuelle», écrit-elle.

Personne, souligne la journaliste avec ironie, n'a «encore osé demander» si la femme de chambre n'avait pas «un peu cherché» ce qui lui est arrivé en n'étant pas assez explicite avec son présumé agresseur.

Clémentine Autain, ex-adjointe du maire de Paris, déplore qu'il y ait «beaucoup de témoignages en faveur de DSK mais peu de messages de compassion pour la présumée victime.

«La plupart de ceux qui réagissent à cette affaire appelle à «penser à l'homme qui traverse cette épreuve». Il n'y a aucun mot pour la femme qui a déposé plainte, et peut-être, je dis bien peut-être, a été victime d'une agression sexuelle. Ce sont deux poids, deux mesures qui me laissent stupéfaite», dénonce-t-elle.

Osez le féminisme prévient pour sa part qu'il est grave de «condamner sans savoir», mais aussi de «jeter le soupçon sur les propos de la plaignante», ajoutant du même coup «à sa souffrance».

L'organisation relève que les blagues qui se multiplient relativement à l'affaire «montrent à quel point les violences faites aux femmes sont encore minorées dans l'imaginaire collectif» français.