Plus d'un million de Chinois ont passé ce week-end le concours national annuel pour entrer dans le service public, forme moderne d'une tradition impériale millénaire, dans l'espoir de décrocher l'un des 19 000 postes offerts.

Un total de 1,12 million de personnes s'est présenté au concours national de la fonction publique, a indiqué lundi l'Agence d'État chinoise de l'administration publique. Un nombre record de 1,52 million de personnes s'étaient inscrites et qualifiées pour le passer, selon le Global Times, un journal officiel.

Mais selon le quotidien, seuls 19 000 postes étaient en jeu - ce qui signifie que moins d'un candidat sur 50 sera retenu.

La concurrence la plus vive concerne la Commission nationale des minorités ethniques, avec 14 384 candidats pour seulement deux postes: selon plusieurs médias chinois, le processus d'inscription et de sélection pour ces postes apparaissait moins compliqué, ce qui expliquerait leur popularité.

Alors que les jeunes diplômés chinois sont confrontés à une compétition féroce sur le marché du travail, les postes de fonctionnaires sont particulièrement prisés pour la sécurité de l'emploi, mais également pour les privilèges et le statut social qu'ils confèrent.

Les avantages accordés peuvent comprendre des allocations régulières en complément du traitement de base, une couverture médicale, une pension de retraite et même parfois un logement - ce qui est particulièrement attrayant alors que la Chine connaît une flambée des prix immobiliers.

La tenue très médiatisée de ce concours annuel suscitait des réactions ironiques et désabusées chez certains internautes chinois.

«(Les candidats) veulent-ils vraiment réussir le concours pour 'servir le peuple'? Bien sûr que non. Ils veulent désespérément profiter du système des privilèges et salaires (garantis)», a commenté un usager du réseau social Weibo.

«À chaque fois, ils concourent en fait pour avoir le droit de recevoir des pots-de-vin et de détourner la loi (à leur profit)», déplorait un autre internaute.

Le système actuel est l'héritier de la longue tradition des concours impériaux de la Chine ancienne, connus sous le nom de «keju» et ayant pris leur essor dès la dynastie Song (580-618 après JC).

Ces concours impériaux étaient largement basés sur la connaissance des classiques confucéens et destinés à sélectionner sur la base de la méritocratie les meilleurs serviteurs de l'État possible, mais ils récompensaient surtout les fils de familles fortunées ou bénéficiant de l'appui d'un protecteur, étant donné le caractère très onéreux de la préparation.

Après la fondation en 1949 de la République populaire par le Parti communiste chinois (PCC), les recrutements pour le vaste appareil de l'État se sont surtout effectués en fonction des diplômes universitaires, de l'appartenance au Parti ou par l'intermédiaire de relations.

Mais le système des concours avait été réintroduit en 1994, en réponse au mécontentement populaire contre le népotisme, les abus de pouvoir et les cas de favoritisme.

Il y avait quelque sept millions de fonctionnaires en Chine fin 2012, selon des chiffres de l'administration.

Le concours national annuel comprend un test d'aptitude et la rédaction d'un essai sur les politiques publiques. Les candidats qui réussissent sont ultérieurement soumis à une impitoyable série d'entretiens.

Des concours existent à tous les échelons de l'administration chinoise, mais l'examen national annuel permet d'accéder aux meilleurs postes.

«Même si le concours national est bien plus difficile que les examens provinciaux, je voulais (y prendre part) pour engranger de l'expérience», a indiqué Lü Yue, une étudiante diplômée citée par le Global Times.

Elle concourrait ce week-end pour l'un des deux postes offerts par le Bureau des Affaires maritimes de Tianjin (est) - contre 800 autres candidats.