Plusieurs milliers de Sud-Africains ont défilé mercredi au Cap et à Pretoria pour manifester contre la corruption, visant particulièrement le président Jacob Zuma et son gouvernement.

Les organisateurs de la manifestation - ONG, syndicats, églises - ont remis un mémorandum au ministre de la Justice Jeff Radebe, devant le palais présidentiel dans la capitale sud-africaine, tandis qu'une marche similaire se déroulait simultanément au Cap, siège du Parlement.

«Nous, citoyens et résidents d'Afrique du Sud sommes réunis ici (...) pour dire au gouvernement que nous en avons assez de la corruption qui affecte notre économie, détruit nos emplois, spolie les pauvres et mine les bases de notre démocratie», a indiqué l'ONG Unite Against Corruption, organisatrice de l'évènement, dans un communiqué.

Le ministre de la Justice a tenté de prendre la parole devant le palais présidentiel, mais il a été interrompu par les huées des manifestants.

Julius Malema, le président du parti d'opposition des Combattants pour la liberté économique (EFF), a interpellé Jacob Zuma, dont il demande la démission: «Les gens sont venus ici, car ils souffrent de la corruption. Le palais présidentiel, vous le verrez à la télévision», a-t-il lancé, provoquant les rires de la foule.

«Nous reviendrons le 14 octobre, l'été va être très très chaud» a poursuivi Zwelinzima Vavi, l'ex-secrétaire général de la puissante centrale syndicale Cosatu en faisant référence à une nouvelle marche prévue par les syndicats dans deux semaines.

Les marcheurs qui ont traversé la capitale sud-africaine sous un soleil de plomb ciblaient particulièrement le président Zuma, empêtré depuis des mois dans le scandale de la rénovation de sa résidence de campagne privée. Sous couvert de travaux de sécurité, la facture des travaux s'est élevée à près de 15 millions de dollars.

«Méthode digne de l'apartheid»

D'autres affaires minent la vie publique sud-africaine, suscitant chez certains l'impression que la démocratie, chèrement acquise en 1994 avec Nelson Mandela, a surtout servi à enrichir une petite classe dirigeante, alors que le pays, encore couvert de bidonvilles, se débat avec un chômage record et une économie au ralenti.

Cette semaine, l'ANC a démenti des accusations du gendarme boursier américain (SEC) selon lesquelles il aurait reçu de l'argent illégalement de la part du groupe japonais Hitachi pour la construction de turbines, à la fin des années 2000.

L'affluence de cette marche contre la corruption n'a pas atteint les 10 000 personnes espérées par les organisateurs. Mais il y a quelques jours le gouvernement avait refusé aux syndicats impliqués la possibilité de déposer un préavis de grève, pour que leurs adhérents puissent venir manifester.

La manoeuvre a été qualifiée par certains critiques de méthode digne de l'apartheid, le régime raciste aboli en 1994.

Des personnalités de la société civile, dont le prix Nobel de la paix Desmond Tutu, ont apporté leur soutien à la manifestation.

«Une société qui répartit ses ressources en fonction de la proximité des gens avec le pouvoir n'est pas moins coupable qu'une société qui répartit ses ressources en fonction de la couleur de la peau», a déclaré l'ex-archevêque dans un communiqué diffusé par sa fondation.

Au Cap, environ 2000 manifestants étaient rassemblés en début d'après-midi. Certains brandissaient des banderoles affirmant entre autres: «L'apartheid nous a volé notre passé. La corruption nous vole notre avenir».