Le président américain Barack Obama est arrivé vendredi soir à Pretoria pour une visite de trois jours en Afrique du Sud où l'ancien président Nelson Mandela reste entre la vie et la mort, même si ses proches ont fait état d'une amélioration de son état de santé.

Il n'est pas prévu que Barack Obama se rende au chevet du héros national âgé de près de 95 ans, sauf si la famille de l'ancien président sud-africain devait en décider autrement. Mais M. Obama insiste sur sa volonté de ne pas jouer les intrus à l'hôpital.

En provenance du Sénégal où il avait entamé cette tournée africaine qui doit aussi le mener en Tanzanie, le président Obama a atterri vers 20 h 15 locales (14 h 15 à Montréal) sur la base militaire de Waterkloof près de Pretoria. Mais son programme officiel ne commence pas avant samedi.

Après un tête-à-tête matinal avec le président Jacob Zuma, il a prévu une allocution solennelle depuis l'Union Buildings, siège du gouvernement sud-africain avant de se rendre à Soweto pour s'adresser aux étudiants, dans ce haut-lieu de la résistance à l'apartheid.

La journée de dimanche le conduira au Cap où M. Obama a prévu une visite à Robben Island, le bagne où Nelson Mandela a passé 18 de ses 27 années de détention et où il a vraisemblablement contracté les lésions pulmonaires à l'origine de ses problèmes de santé à répétition.

Vendredi, lors d'un point de presse improvisé, l'ex-femme de Nelson Mandela, Winnie Madikizela-Mandela, a affirmé qu'il était prématuré pour les médias de parler au passé du héros de la lutte contre l'apartheid.

«Par rapport à comment il était il y a quelques jours, il y a une grande amélioration», a-t-elle dit, tout en ajoutant que «cliniquement il ne va toujours pas bien».

La veille, la fille aînée de Mandela, Makaziwe avait indiqué que son père réagissait encore par le regard ou le toucher à la présence de ses proches qui le veillent depuis trois semaines, et en particulier son épouse Graça.

De son côté, la présidence sud-africaine n'a publié aucun nouveau bulletin de santé depuis jeudi après-midi. Le pronostic vital est engagé depuis dimanche dernier.

Mandela mourant, les dossiers économiques au coeur de la visite du président Obama, notamment la clause douanière AGOA qui bénéficie aux produits sud-africains sur le marché américain, devraient passer au second plan.

«Le président va parler de l'héritage de Nelson Mandela, et cela va occuper une grande part de notre temps en Afrique du Sud», a déclaré le conseiller adjoint à la sécurité américaine Ben Rhodes.

Durant le trajet depuis Dakar, M. Obama a souligné qu'il tenait à ne pas importuner la famille. «Je n'ai pas besoin d'une photo avec lui. La dernière chose que je veux faire, c'est être indiscret à un moment où la famille est inquiète», a-t-il dit.

Première rencontre en 2005

Les deux hommes s'étaient déjà rencontrés en 2005, alors que Obama était un jeune sénateur et ils se sont depuis parlé plusieurs fois au téléphone.

À quelques heures de son arrivée, le Mediclinic Heart Hospital de Pretoria où est soigné le prix Nobel de la paix 1993 continuait d'être le point de ralliement de nombreux Sud-Africains, soucieux de témoigner leur affection à Mandela.

Chants, prières, cartes de voeux, ballons, bougies témoignent depuis plusieurs jours de la ferveur de tout un peuple communiant avec le monde entier par le truchement d'un bataillon de dizaines d'envoyés spéciaux postés devant l'hôpital.

«J'ai pensé que je devais venir voir ce qui se passe et aussi mettre mon message de voeu sur le mur (de l'hôpital). Il est celui qui nous a appris le pardon, il est notre héros et notre père, il nous a appris à être unis», a témoigné Sikelela Dube, un étudiant de 23 ans de Pretoria.

L'effervescence médiatique, comparée jeudi par la famille à un vol de «vautours», a donné lieu vendredi à des débordements. Un journaliste a été interpellé pour avoir fait voler au-dessus de l'hôpital une caméra montée sur un hélicoptère miniature télécommandé.

L'ANC, le parti qui gouverne l'Afrique du Sud depuis 1994, mais dont l'aura a bien diminué depuis que Mandela a quitté le pouvoir en 1999, a dû se défendre de toute tentative de récupération après une apparition en force devant l'hôpital, avec drapeaux et affiches électorales.

Le pays s'était préparé au pire jeudi, après l'annulation d'un voyage de Jacob Zuma au Mozambique à l'issue d'une visite à l'hôpital. Mais la présidence avait ensuite fait savoir que Mandela allait mieux. «Son état reste critique, mais s'est stabilisé», avait-elle indiqué.

La visite d'Obama a suscité quelques grincements de dents en Afrique du Sud, notamment au sein de la communauté musulmane et dans les rangs syndicaux. Une cinquantaine d'étudiants musulmans ont prié devant l'ambassade américaine en signe de protestation contre la «politique étrangère brutale» des États-Unis.

Ils ont été rejoints par quelques dizaines de militants de la COSATU, la grande confédération syndicale proche du pouvoir sud-africain, venus dénoncer «l'impérialisme américain».

Nombre d'entre eux portaient des tee-shirts où était écrit «Non, Obama, vous ne pouvez pas emprisonner sans procès», en référence à la prison de Guantanamo.