Un commerce intense avait repris samedi dans les faubourgs pauvres de Maputo en dépit des patrouilles omniprésentes de la police anti-émeutes, mais des rumeurs persistantes annonçaient la reprise prochaine des protestations contre le coût élevé de la vie, qui ont fait 10 morts en trois jours.

«Les gens disent que les violences vont reprendre lundi», soulignait le porte-parole de la police de la capitale mozambicaine, Arnaldo Chefo. «Nous ne savons pas si c'est vrai.»

«Je peux prédire que les gens vont continuer de manifester face à un gouvernement qui fait si peu pour son peuple», affirmait, péremptoire, Silveira Mabicka, 34 ans, qui travaille en Afrique du Sud où il construit des piscines.

Autour de lui, le «bairro» (quartier) de Benfica bruissait d'activités, après la paralysie provoquée par trois jours d'émeutes. Les vendeurs à la sauvette proposaient canettes de boisson, oranges à la pièce, morceaux de canne à sucre, charbon et poulets vivants.

Les klaxons des taxis collectifs bondés couvraient les conversations, frayant un chemin dans la foule à ces minibus bringuebalants.

La grande route vers le nord, qui traverse Benfica, a été débarrassée des débris des barricades. Mais la chaleur torride des pneus brûlés a imprimé des marques noires sur l'asphalte, bordé de carcasses de voitures carbonisées. Sur les à-côtés gisaient des tuyaux arrachés.

Par contraste, peu de gens se pressaient sur les trottoirs du centre-ville, une fois résorbées les files d'attente du matin devant les distributeurs de billets.

Les résidents mieux lotis de Maputo s'inquiétaient des rumeurs de nouvelles émeutes. Un restaurateur, qui a préféré garder l'anonymat, allait jusqu'à se demander s'il ne vaudrait pas mieux «évacuer».

«Il y a beaucoup de textos appelant à la grève générale lundi», a confirmé le secrétaire général de la Croix-rouge nationale, Americo Ubisse, notant que c'est déjà par ce biais qu'avait été lancé le mot d'ordre de mobilisation mercredi, et que «personne n'y avait prêté attention».

A l'annonce d'une nouvelle hausse du prix du pain, des milliers de protestataires étaient descendus dans les rues. En trois jours, les émeutes ont fait dix morts et plus de 400 blessés, selon le bilan officiel inchangé samedi.

En attendant, les équipes de la Croix-rouge sur le terrain n'ont «transmis aucune information nouvelle», a ajouté M. Ubisse, estimant que le calme devrait prévaloir tout le week-end.

Les escarmouches dans les quartiers périphériques ont complètement cessé, a confirmé la police.

Vendredi encore, trois policiers avaient été atteints par des jets de pierres, lors d'affrontements dans les faubourgs de Benfica et Hulene. A Chimoio (centre), à 750 km au nord de Maputo, six personnes avaient été blessées dans les premières manifestations rapportées en dehors de la capitale.

Dévasté par la longue guerre civile (1976-1992) qui a suivi un conflit armé pour l'indépendance de l'ancienne colonie portugaise, le Mozambique connaît une misère alarmante. 65% de ses 20 millions d'habitants vivent sous le seuil de pauvreté.

Les prix ont flambé ces derniers mois en raison de la montée des cours mondiaux des céréales mais aussi de la dépréciation de la devise nationale dans un pays très dépendant des importations.

En 2008 déjà, six personnes avaient été tuées dans des émeutes contre la hausse des prix des taxis collectifs.