La situation était «assainie» vendredi en Guinée-Bissau au lendemain du coup de force de militaires mutinés, a affirmé le Premier Ministre Carlos Gomes Junior, qui avait été lui-même arrêté, menacé de mort et placé en résidence surveillée.

«La situation est maintenant assainie. Je peux vous assurer que les institutions vont se remettre à fonctionner normalement», a-t-il indiqué à la presse après une rencontre avec le président Malam Bacai Sanha pour résoudre la crise.

Cette normalisation de la situation était perceptible vendredi dans la capitale où l'activité avait repris. Les militaires qui patrouillaient jeudi dans les grandes artères n'étaient plus visibles. Et la radio nationale, qui passait jeudi de la musique militaire, avait repris ses émissions.

«Je ne démissionnerai pas car j'ai été élu démocratiquement (à l'occasion des élections législatives de fin 2008), je considère ce qui s'est passé jeudi comme un incident», a ajouté le Premier ministre.

Il avait été arrêté par des militaires mutinés jeudi matin, avant d'être placé en résidence surveillée à son domicile jusqu'à vendredi. Mais en début d'après-midi, le dispositif militaire autour de sa résidence a été sensiblement allégé et les soldats remplacés par quelques policiers, selon un témoin.

Ce coup de force, intervenu dans ce petit pays d'Afrique de l'Ouest considéré comme une plaque tournante du trafic de cocaïne, avait été immédiatement condamné par la communauté internationale.

Il s'apparente à un «putsch» au sein des forces armées plutôt qu'à un coup d'Etat classique, le chef d'état-major des forces armées, le général José Zamora Induta, ayant été «renversé» par son adjoint, le général Antonio Indjai.

Le général Induta était vendredi toujours détenu dans une base aérienne près de l'aéroport international.

Vendredi, un «collectif» des membres du gouvernement de Guinée-Bissau avait condamné «l'utilisation de la force comme moyen de résoudre les problèmes», et exprimé dans un communiqué son soutien au Premier ministre.

L'armée constitue une institution toute puissante dans ce pays régulièrement secoué par les crises et assassinats politico-militaires.

Ex-colonie portugaise, la Guinée-Bissau est classée parmi les pays les plus pauvres du monde. Elle est considérée comme un lieu stratégique pour le trafic de la cocaïne en provenance d'Amérique du Sud qui transite dans le pays avant d'être acheminée vers les marchés européens.

Le nouvel homme fort du pays a assuré jeudi soir que le coup de force représentait «un problème purement militaire» et que l'armée réitérait «son attachement et sa soumission au pouvoir politique».

A ses côtés, lors d'une conférence de presse, un autre officier a fait son retour sur le devant de la scène: le contre-amiral José Américo Bubo Na Tchute, accusé de tentative de coup d'Etat en août 2008.

Celui-ci s'était réfugié en Gambie avant de revenir clandestinement en pirogue à Bissau, en décembre, et de trouver refuge dans les locaux de l'ONU qu'il a quitté jeudi à la mi-journée pour rejoindre les mutins.

Il est aussi soupçonné d'être impliqué dans le trafic de cocaïne sud-américaine en Guinée-Bissau.

Ces nouvelles violences avaient provoqué une grande inquiétude au sein de la communauté internationale, tant le pouvoir politique apparaît fragile face à une armée toute puissante et aux narco-trafiquants qui paraissent intouchables.

Pour la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l'Homme (RADDHO), basée à Dakar, «l'armée est la véritable gangrène de la Guinée, elle contrôle, régule et rend une justice expéditive».