La couverture de l'attentat de Boston m'a fait rater plusieurs nouvelles importantes, dont la remise en question des conclusions d'un article brandi depuis sa parution en 2010 par les partisans de l'austérité en Europe et aux États-Unis, dont l'ancien candidat à la vice-présidence Paul Ryan.

Intitulé «Croissance en période de dette» et signé par deux économistes réputés de Harvard, Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff, l'article démontrait, en s'appuyant sur des données collectées entre 1946 et 2009, que la croissance s'est avérée sensiblement inférieure dans les pays dont la dette publique dépassait 90% du PIB.

Or, trois économiques de l'Université du Massachusetts à Amherst ont relevé de «graves erreurs» dans les calculs du duo de Harvard, erreurs qui dégomment à leur avis leurs conclusions. Selon leurs travaux publiés le 15 avril, le seuil de 90% n'a aucune signification particulière et lien entre croissance du PIB et endettement n'est que très faible.

D'où la question qui tue : les politiques d'austérité en Europe et aux États-Unis reposeraient-elles sur de fausses conclusions?

Le débat sur l'étude des économistes de Havard se poursuit aujourd'hui dans les pages d'opinions du New York Times. Dans une chronique, l'économiste Paul Krugman exprime le souhait que la remise en question des conclusions de Reinhart et Rogoff forcera les partisans de l'austérité à remettre en question leurs politiques. Il n'y croit pas trop.

Dans la même page, les deux universitaires de Harvard défendent leur étude, minimisant notamment l'importance relative de leurs erreurs de calcul par rapport à des «siècles de données».

L'humoriste Stephen Colbert n'est évidemment pas un économiste. Mais il n'a pu résister à l'envie de se payer la tête du duo Reinhart-Rogoff, comme on peut le constater dans la vidéo qui coiffe ce billet.