Raul Castro a délaissé samedi le thème des réformes dans son discours à la nation pour la fête nationale du 26 juillet, prévenant au contraire les Cubains que l'heure n'était plus aux «bonnes nouvelles» au vu de la situation économique internationale.

A Santiago de Cuba, deuxième ville du pays, sous un immense portrait de son frère Fidel et devant un parterre de 10 000 invités triés sur le volet, le chef de l'Etat a également prévenu Washington que, «quels que soient les résultats des élections présidentielles» de novembre, l'armée cubaine ne baissera pas la garde et poursuivrait sa «préparation» et sa «modernisation».

A cinq mois du 50e anniversaire de la révolution cubaine, Raul Castro, en uniforme de général, a également annoncé que les célébrations prévues se tiendraient à Santiago. La capitale méridionale du pays, au pied de la Sierra Maestra, s'était rendue aux «barbudos» le 1er janvier 1959 et Fidel Castro y avait tenu son premier discours de vainqueur, pendant que ses troupes entraient à La Havane, 950 km au nord-ouest.

Dénonçant dans son discours de 48 minutes «la passivité des gouvernants des pays riches et des grandes entreprises multinationales» devant la crise provoquée par la flambée des cours alimentaires et pétroliers, Raul Castro a prévenu qu'elle aurait des «conséquences inévitables» à Cuba, qui importe 84% de son alimentation.

«La Révolution a fait et continuera de faire tout ce qui est à sa portée pour continuer d'avancer et de réduire au minimum les inévitables conséquences de l'actuelle crise internationale pour la population», car, a-t-il dit, «nous ne pouvons dépenser plus que ce que nous avons».

«Toutefois, nous devons expliquer opportunément à notre peuple les difficultés et nous préparer ainsi à les affronter. Il faut s'habituer à ne pas recevoir que des bonnes nouvelles», a-t-il ajouté.

Pour le reste, le président cubain, âgé de 77 ans, a détaillé les travaux en cours de réhabilitation du pays, citant au passage le chiffre de 1,3 million de touristes de janvier à juin, soit une augmentation de 14,8% sur la même période l'an dernier.

«Raul appelle toujours les choses par leur nom et ne promet jamais ce qu'il ne peut tenir», a déclaré à l'AFP Alexander Despaigne, un étudiant de 20 ans présents parmi les invités.

La fête nationale a marqué aussi cette année le deuxième anniversaire de la dernière apparition en public de Fidel Castro, terrassé le 26 juillet 2006 par une grave hémorragie intestinale qui l'a contraint à céder le pouvoir à son frère Raul, d'abord provisoirement, puis «définitivement» en février dernier.

Depuis, le cadet des Castro a engagé de timides changements, dénoncés comme «cosmétiques» par Washington, en libéralisant notamment l'accès des Cubains à la téléphonie portable et aux ordinateurs.

Un an plus tôt, encore président intérimaire, il s'était engagé à des «changements structurels et conceptuels» qui, aux yeux de beaucoup de Cubains, tardent à venir.

Raul Castro a également engagé une distribution des terres en friche --51% des terres cultivables-- aux petits exploitants.

Mais, loin d'orienter le socialisme cubain vers les voies suivies par la Chine ou le Vietnam, il n'a fait jusque là aucune concession en faveur de l'apparition d'un secteur privé ou d'un assouplissement d'un système de gestion ultra-centralisé. Et encore moins à une dissidence toujours malmenée.

Bien qu'éloigné du pouvoir, Fidel Castro continue de veiller aux décisions majeures pour l'avenir du régime et intervient régulièrement par voie de presse pour donner le ton.

Après le discours présidentiel, les «Santiagueros» devaient reprendre les rues pour la dernière nuit du carnaval de la ville la plus métissée de Cuba, au son des «congas» et salsas, et avec rhum à volonté.