En Irak, l'heure est à la reconstruction et à la bataille de l'opinion: avec force véhicules blindés et soldats surarmés, l'armée américaine a inauguré samedi la piscine publique, rénovée par ses soins, du parc al-Zaoura, le plus grand espace vert de Bagdad.

Jusque là, les violences empêchaient la reconstruction d'un pays ravagé par cinq années de guerre. Mais depuis quelques mois, l'Irak connaît une nette amélioration de la sécurité.

Samedi matin, sept Humvees de l'armée américaine ont acheminé quelques journalistes de la «zone verte» de Bagdad au parc al-Zaoura voisin, connu des Bagdadis pour son grand zoo, dont la majorité des animaux ont disparu pendant la guerre, mangés par des habitants affamés, volés ou morts faute de soins.

Sur les pelouses, des centaines de personnes sont allongées à l'ombre pour échapper à la chaleur.

Les travaux de rénovation de la piscine publique du parc ont coûté 495.350 dollars aux États-Unis. Elle avait été fermée sous Saddam Hussein et laissée à l'abandon il y a plus de dix ans, selon un porte-parole de l'armée américaine.

Vers 10H30 locales (07H30 GMT), une demi-dizaine d'enfants se baignent dans le petit bain. Autant d'adultes plongent dans le bassin olympique entouré d'une quarantaine de militaires américains armés, casqués et sanglés dans leurs gilets pare-balles.

Mountawar, 11 ans, ne se laisse pas distraire par ce genre de détails. Pressé de se baigner, il n'a même pas enlevé son pantalon avant de sauter dans l'eau.

«C'est super, je suis très content. C'est la première fois que je viens dans cette piscine, je reviendrai avec mes copains», lance-t-il, alors que ses petites soeurs hurlent de joie dans l'eau, observées par leur mère souriante, assise à l'ombre d'un parasol.

Hommes et femmes se partageront les jours d'ouverture de la piscine.

«Nous sommes tellement contents, cette piscine servira à tous les Bagdadis et à tous les Irakiens, car tous les Irakiens, quand ils viennent à Bagdad, viennent dans ce parc», se réjouit Yahya Mohammed Ali, adjoint au maire de Bagdad chargé de la jeunesse et des sports, venu pour la cérémonie d'ouverture.

«C'est un symbole du retour de la paix dans le pays», estime-t-il, affirmant que le parc et la piscine «sont très sûrs» grâce aux «contrôles de sécurité à l'entrée».

La poursuite des violences en Irak -les attentats à la bombe demeurent quasi quotidiens- n'ont pas empêché la société américaine C3 d'annoncer récemment qu'elle projetait de construire, à l'emplacement du parc al-Zaoura, la «Baghdad Zoo and Entertainment Experience», un parc d'attraction à l'américaine, avec skate-parcs, promenades, musée...

La Force multinationale en Irak sous commandement américain a lancé dernièrement de nombreuses initiatives de ce genre afin de s'attirer les bonnes grâces de l'opinion irakienne. Certains sont sensibles à cette stratégie théorisée dans les manuels de contre-insurrection.

«C'est une bonne chose que les Américains aient ce genre d'initiatives (réparer la piscine, ndlr), car les gens apprécient vraiment», juge Mitzak Muhy Attyah, 30 ans, venu avec des amis du quartier de Dora, dans le sud de Bagdad.

«Cela nous a manqué à tous, je crois. Et maintenant le parc est sûr.»

«Les nôtres, le gouvernement irakien, ne font jamais rien de ce genre», râle un de ses amis. «Ils ne font que prendre de l'argent», ajoute un autre.

Le petit groupe s'interrompt brusquement. Comme plusieurs fois par jour, les petits hélicoptères noirs de la société de sécurité américaine Blackwater passent à très basse altitude, assourdissant tout le monde du bruit de leurs turbines.