La baisse des revenus issus de la location de films a définitivement rattrapé La Boîte Noire qui, à compter de demain, mettra en vente une importante partie de son fonds d'oeuvres à louer, soit quelque 52 000 unités de produits, a appris La Presse.

Cela ne signifie ni une fermeture, comme la succursale de l'avenue Laurier, ni une liquidation, avertit toutefois le propriétaire et fondateur François Poitras. La Boîte Noire restera ouverte avec un stock de quelque 5000 titres en DVD et Blu-ray, auxquels s'ajoutera une plus grande offre de produits dérivés.

«C'est en quelque sorte le trésor de guerre que j'ai constitué depuis 28 ans qui va être mis en vente, dit François Poitras en entrevue. La moitié des produits qui se retrouveront en vente sont hors du marché. Il y aura énormément de pièces rares.»

Ce dernier se défend toutefois que l'affaire soit une «vente de feu». Les films seront vendus selon trois catégories de prix. Et tant que les copies de films ne seront pas vendues, la clientèle pourra encore les louer.

M. Poitras ne souhaite pas revoir ce qui s'est passé en avril 2012 lorsque de longues files de clients à la recherche de rabais s'étaient formées aux abords de sa succursale de l'avenue Laurier. Cette fois, d'ailleurs, les intéressés pourront faire leurs achats en ligne sur le site du magasin.

Le phénomène de la baisse des revenus de location de films s'est traduit par de nombreuses fermetures au Québec ces dernières années. En mai 2014, alors que le vidéoclub DéjàVu de Limoilou fermait ses portes, le quotidien Le Soleil indiquait que 46% de ces commerces avaient cessé leurs activités depuis 2008.

On sait que la possibilité maintenant d'acheter ou de louer des films en ligne a fait mal aux vidéoclubs, tant en Amérique du Nord qu'ailleurs dans le monde.

La Boîte Noire n'a pas échappé à cette réalité. Après la fermeture de la succursale de l'avenue Laurier en 2012, l'entreprise de M. Poitras avait été forcée, en juillet 2013, de négocier avec ses créanciers pour éviter une faillite.

«Il est certain que la location est moins intéressante qu'elle ne l'était, dit le propriétaire. Dans les nouveautés, il y a une certaine stabilité. Mais pour ce qui est du fonds, il est disproportionné par rapport aux revenus qu'il rapporte. On veut qu'il amène des revenus plus intéressants à l'entreprise.»

Changement de modèle

François Poitras a ouvert son magasin de l'avenue du Mont-Royal le 30 novembre 1986 alors qu'il terminait son baccalauréat en littérature. «C'était l'arrivée du VHS et je voyais ça comme l'invention de l'imprimerie, dit-il. J'y trouvais un potentiel extraordinaire.»

Ironique signe des temps, aujourd'hui, l'entreprise entend se départir de toutes ses copies VHS.

M. Poitras ne semble pas trop amer ou nostalgique face à ce qu'il s'apprête à vivre. Il présente la situation comme «un changement de modèle d'affaires».

Lorsqu'on lui demande de nous décrire son état d'esprit, il répond: «Le monde de la vidéo a connu des mutations aux cinq à huit ans. Nous entrons dans une nouvelle ère. Le fonds que j'ai n'a plus la même importance qu'il a déjà eue. On rencontre moins de gens qui cherchent des films de Bergman. Il faut donc s'adapter.»