Le piratage de films a presque disparu des cinémas canadiens depuis l'adoption de lois fédérales plus sévères.

Il y a quelques années seulement, Montréal raflait le titre capitale de l'enregistrement illégal et du piratage de films en Amérique du Nord et Calgary n'était pas loin derrière.

Mais de nouveaux rapports suggèrent que les enregistrements illégaux de films sont maintenant rarissimes dans ces deux villes.

Les nouvelles lois, adoptées sous les pressions d'Hollywood et du gouverneur de la Californie Arnold Shwarzenegger, ont mené à deux arrestations à Montréal et une à Calgary au cours des dernières années.

Mais des sceptiques doutent que le problème ait déjà été aussi important que ce que déplorait Hollywood.

«Est-ce possible que ces trois arrestations à Montréal et Calgary aient mené à autant de changements?» se questionne Michael Geist, professeur en droit de l'Université d'Ottawa spécialisé en droits d'auteur.

«Non, je ne crois pas», a-t-il répondu, en entretien récemment.

L'industrie cinématographique soutenait pourtant qu'entre 20 et 70 pour cent des enregistrements illégaux provenaient du Canada. Elle allait même jusqu'à blâmer Montréal pour près du quart du piratage produit à l'échelle mondiale.

Depuis l'adoption de la loi C-59 en juin 2007, toute personne qui enregistre un film sans permission est passible d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à deux ans. 

Dans le cas d'un enregistrement en vue de louer ou vendre le film, la peine peut aller jusqu'à cinq ans de prison.

Avant la mise en oeuvre de cette législation, l'Association canadienne des distributeurs de films disait avoir répertorié 116 enregistrements illégaux dans les cinémas montréalais en 2007 seulement. Mais depuis octobre 2007, aucune infraction n'a été signalée à Montréal.

Vince Guzzo, qui est à la tête des Cinémas Guzzo, affirme que ses salles ne sont plus la cible des pirates. Il croit que la nouvelle législation ainsi que le renforcement des mesures de sécurité dans les cinémas sont à l'origine de cette volte-face.

«Ceux qui n'étaient pas nécessairement des criminels mais qui pensaient que ce serait amusant de pirater un film semblent beaucoup moins intéressés à le faire maintenant et les vrais criminels qui s'adonnaient au piratage ont été arrêtés», a-t-il soutenu lors d'une entrevue récente.

Louis-René Haché a plaidé coupable en février à des accusations reliées à l'enregistrement illégal de la comédie romantique «Dan in Real Life» dans un cinéma de Montréal. Il a été condamné à 24 mois de probation et 120 heures de travail communautaire.

A Calgary, Richard Lissaman a été condamné à 1500 $ d'amende en novembre 2008 pour avoir enregistré illégalement le film Sweeney Todd. Il lui a également été interdit de se trouver dans un cinéma pour un an.

Un autre Montréalais, Geremi Adam, subira son procès à l'automne. Les films qu'il piratait étaient d'une très grande qualité, ce qui avait attiré l'attention du FBI et de la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

Le sergent Noël St-Hilaire de la GRC confirme que la nouvelle législation permet aux policiers d'intervenir plus efficacement.

«Le nombre de plaintes a chuté de manière draconienne», a-t-il précisé.

Le sergent St-Hilaire croit que la technologie permettant à un film d'être diffusé à travers le monde en quelques minutes seulement pourrait avoir mené les autorités américaines à croire qu'il y avait de nombreux pirates qui sévissaient depuis Montréal.

«Cela pourrait avoir créé l'illusion que Montréal était un endroit névralgique du piratage, alors qu'il n'y avait vraiment que quelques individus qui étaient impliqués», a-t-il dit.

Selon Michael Geist, les Américains ont sûrement fait pression sur le Canada pour que le pays renforce ses lois contre le piratage pour ainsi servir d'exemple aux autres pays.

«Plusieurs allégations étaient exagérées, ce qui a généré  une sorte d'hystérie qui a notamment mené les studios à menacer de ne pas distribuer tous leurs films au Canada», a-t-il conclu.
Quelques sceptiques doutent toutefois que le problème ait déjà été aussi important que ce que clamait Hollywood.