Sur le Lido, le vélo est l'outil indispensable, les acheteurs de films, quant à eux, sont fixés en cinq minutes et l'acteur Viggo Mortensen (Le Seigneur des anneaux) parle de Camus et de Sartre avec les journalistes: les échos de la 71e Mostra.

À vélo sur le Lido

Sur cette île de la lagune de Venise qui fait face à la célébrissime place Saint-Marc, le vélo est l'indispensable moyen de locomotion pour les milliers de personnes accréditées pour la Mostra. Professionnels du 7e art, journalistes vont et viennent entre les hôtels et les salles obscures distantes de quelques centaines de mètres les uns des autres et le son des sonnettes résonne du matin au soir. Seul problème toutefois, trouver un emplacement pour attacher son vélo car les arbres, poteaux de signalisation et autres barrières métalliques sont pris d'assaut, surtout aux heures de projection. Au pays du Voleur de bicyclette, on n'est jamais trop prudent...

Cinq minutes pour convaincre

Au marché du film, installé au 3e étage du luxueux Hôtel Excelsior, les acheteurs (souvent des distributeurs) n'y vont pas par quatre chemins. «Lorsqu'ils visionnent un film susceptible de les intéresser, ils regardent les cinq premières minutes. Si ça convient, ils avancent encore un peu et regardent dix autres minutes et, si ça colle toujours, demandent alors à avoir un DVD de l'oeuvre complète», raconte à l'AFP le patron de ce grand «mercato» du 7e art, le Français Pascal Diot. «Si au bout de cinq minutes ça ne va pas, en revanche, ils vont dans une autre salle de visionnage», ajoute-t-il. Dures les affaires dans le cinéma? «C'est encore pire chez les programmateurs télé», explique ce professionnel passé par Hachette, Pathé ou TF1. «Quand ils reçoivent des séries, ou des documentaires, ils savent en deux minutes si cela correspond à la ligne éditoriale de la chaîne».

Quand Viggo Mortensen cite Camus et Sarte

Acteur atypique, polyglotte (il parle cinq langues couramment plus quelques bribes d'autres idiomes), peintre à ses heures, Viggo Mortensen est venu à Venise défendre un film français, Loin des hommes, signé David Oelhoffen, et qui se déroule dans les montagnes de l'Atlas en 1954 au début de la guerre d'Algérie. Le film est tiré de la nouvelle d'Albert Camus L'hôte, issu du recueil L'exil et le royaume. Ayant acquis une célébrité planétaire depuis son rôle d'Aragorn dans la trilogie Le Seigneur des anneaux, d'après Tolkien, Viggo Mortensen, qui parle un français parfait, a prouvé devant quelques journalistes qu'il connaissait aussi notre littérature. «Après la Seconde Guerre mondiale, des intellectuels français comme Camus ou Jean-Paul Sarte, qui étaient proches des communistes, ne fermaient pas les yeux sur ce qui se passait, les goulags, les crimes de masse. Ils disaient seulement, «Soyons honnêtes et regardons les choses telles qu'elles sont». (...) Ce que Camus a fait et ce que les gens font lorsqu'à un moment ou à un autre de leur vie ils sont honnêtes, fait qu'ils deviennent amis de leurs ennemis et ennemis de leurs amis», a-t-il dit.