Le réalisateur américain Jonathan Demme, primé aux Oscars pour The Silence of the Lambs, est décédé mercredi à New York des suites d'un cancer de l'oesophage, à l'âge de 73 ans.

Sa carrière s'étend sur plus de quatre décennies, avec des incursions dans de nombreux genres différents, d'un épisode de la série mythique Columbo à un documentaire sur le chanteur Justin Timberlake, sa dernière réalisation, en passant par un film-concert sur les Talking Heads devenu un classique, Stop Making Sense.

Mais Jonathan Demme aura surtout marqué pour The Silence of the Lambs (1991) et Philadelphia (1993), tournés coup sur coup au début des années 90.

L'atmosphère irrespirable de The Silence of the Lambs, qui évoque la collaboration entre un tueur cannibale machiavélique et une policière à la recherche d'un tueur en série, a marqué une génération.

Il avait valu à Jonathan Demme l'Oscar du meilleur réalisateur en 1992.

Quant à Philadelphia, il est un des premiers films à avoir traité directement des ravages du sida au sein de la communauté homosexuelle.

Tom Hanks avait reçu le prix d'interprétation aux Oscars pour son rôle principal dans le film, et Bruce Springsteen celui de la meilleure chanson pour le mélancolique The Streets of Philadelphia.

Homme d'engagements

De Martin Scorsese à Tom Hanks, en passant par les vedettes de son film The Silence of the Lambs, les réactions du monde du cinéma ou de la musique ont afflué pour rendre hommage à ce réalisateur originaire de Long Island, près de New York, qui menait une vie discrète mais engagée.

«J'ai le coeur brisé car je perds un ami, un mentor, un type si singulier et dynamique qu'il faudrait un ouragan pour le maîtriser», a déclaré Jodie Foster.

«Je suis vraiment choqué et très triste», a dit pour sa part Anthony Hopkins. «Il était parmi les meilleurs, et quelqu'un de vraiment sympathique aussi avec un formidable état d'esprit».

«Jonathan nous a montré à quel point on pouvait avoir grand coeur, et comment cela pouvait guider notre vie», a témoigné Tom Hanks. «Il était le plus grand des hommes».

«Un homme formidable. Tristesse», a résumé sur Twitter Thierry Frémaux, délégué général du festival de Cannes.

L'épouse de Jonathan Demme et ses trois enfants, qui étaient à ses côtés lorsqu'il est décédé mercredi matin dans son appartement de Manhattan, ont demandé qu'«à la place de fleurs», ceux qui le souhaitaient fassent des dons à l'association de défense des immigrés Americans for Immigrant Justice, située à Miami, en Floride, a indiqué la porte-parole.

«Jonathan Demme était un grand artiste, impliqué dans l'humanitaire, un activiste et un collègue chaleureux et encourageant», a souligné le réalisateur américain Ron Howard.

En 2014, Jonathan Demme, qui était également producteur et scénariste, avait reçu de l'association Americans for Immigrant Justice un prix, le Holly Skolnick Human Rights Award, «pour son investissement dans la cause des réfugiés haïtiens» et, plus généralement, dans celle des immigrés, selon l'organisation.

Ce passionné de musique avait notamment réalisé un documentaire sur le journaliste haïtien Jean Dominique (The Agronomsit), fondateur de la station de radio indépendante Radio Haïti Inter, assassiné en 2000 pour des raisons politiques.

Il avait également pris publiquement position contre l'engagement américain en Irak en 2003.

AP

Jonathan Demme, Jodie Foster et Anthony Hopkins lors du gala des Oscars en 1992.

Francophile

Jonathan Demme avait fait ses débuts dans le cinéma au début des années 70 sous la houlette du producteur Roger Corman, qui a également contribué au lancement de Francis Ford Coppola, Ron Howard, Martin Scorsese ou James Cameron.

Au sujet de ses influences cinématographiques, Jonathan Demme avait raconté, dans un entretien en 2003, avoir été, brièvement, attaché de presse, à 24 ans, du réalisateur français François Truffaut à l'occasion de la sortie aux États-Unis de La mariée était en noir (1968).

«Je ne savais pas encore que je voulais être cinéaste». «Tirez sur le pianiste a eu un profond impact sur moi. Ce film a changé ma façon de voir le cinéma», dit-il.

Francophile, il avait rendu hommage à la France dans le film The Truth About Charlie (2002), tourné à Paris et dans lequel il avait même glissé des extraits de Tirez sur le pianiste.