Cela peut paraître surprenant, mais avant la création du nouveau film Selma, aucun long métrage majeur n'avait été tourné sur la vie de Martin Luther King Jr. ou sur son implication dans les marches ayant mené à l'adoption de la Loi sur les droits de vote de 1965.

La réalisatrice Ava DuVernay trouve cela étonnant, mais elle croit également que le moment est bien choisi pour présenter un tel long métrage, compte tenu des tensions raciales observées aux États-Unis ces derniers temps.

Le film, qui prendra l'affiche vendredi, met en vedette David Oyelowo dans la peau de King, au moment où celui-ci se joint à des militants de Selma, en Alabama, où seuls 2% des citoyens noirs sont des électeurs inscrits.

Des centaines de personnes se joindront à leurs manifestations, qui commenceront pacifiquement avant de devenir violentes lorsque des agents s'attaqueront aux marcheurs, forçant King à s'adresser au président Lyndon B. Johnson (Tom Wilkinson).

Scénarisé par Paul Webb, le film met également en vedette Carmen Ejogo dans la peau de l'épouse de King, Coretta, Nigel Thatch dans le rôle de Malcolm X et Oprah Winfrey - qui est aussi productrice - dans celui d'Annie Lee Cooper.

Oyelowo admet qu'il trouve «troublant» que le film sorte au moment où des manifestations font rage aux États-Unis, en réaction à la mort récente de Noirs non armés, tués par des policiers.

«C'est troublant parce que le film Selma montre maintenant à quel point peu de choses ont changé», explique l'acteur britannique, finaliste pour un Golden Globe pour son rôle.

«Plusieurs choses ont changé, mais c'est loin d'être suffisant, et pour être honnête, je suis troublé par le fait que depuis l'arrivée au pouvoir de Barack Obama, l'expression Amérique post-raciale fait partie de nos pensées. Je crois que tout le monde, peu importe son opinion sur ce qui se passe, peut constater que nous ne vivons pas dans une Amérique post-raciale.»

L'acteur affirme avoir suivi le développement du projet Selma pendant des années, toujours dans l'espoir d'interpréter Martin Luther King Jr. Il a fait des pressions pour que DuVernay réalise le film parce qu'ils avaient collaboré ensemble dans Middle of Nowhere en 2012.

DuVernay souhaitait montrer, avec son film, «tout ce qui a été nécessaire pour créer un changement dans le monde».

«C'était un groupe de frères et de soeurs qui ont fait le travail, raconte-t-elle. Il y avait un leader, c'était King, mais ça me semblait malhonnête de l'élever au-dessus des autres et de ne pas vraiment raconter l'histoire de ces guerriers qui se sont battus à ses côtés.»