Deux des trois caisses contenant l’œuvre murale Fleuve mémoire de René Derouin ont disparu de son atelier situé à Sainte-Adèle. L’artiste des Laurentides, qui souhaitait l’offrir au Musée d’art contemporain de Baie-Saint-Paul, a porté plainte à la Sûreté du Québec.

René Derouin est assez découragé. Il avait proposé au Musée d’art contemporain de Baie-Saint-Paul de lui donner son œuvre murale Fleuve mémoire inspirée de son projet Migrations, soit le largage de 19 000 statuettes dans le fleuve Saint-Laurent réalisé en juin 1994. Les statuettes avaient été en partie préalablement immortalisées par le photographe de René Derouin, Lucien Lisabelle, pour en garder une trace et ainsi créer Fleuve mémoire, une œuvre de 8 pieds par 24 pieds, avec des tons de rouge provenant d’un papier Kodak spécial, aujourd’hui discontinué.

« Quand j’avais frotté les photos en noir et blanc, ça donnait un rouge qui ressortait, un rouge qui faisait partie de la pigmentation de la photo, dit René Derouin. Alors, je suis très attaché à cette œuvre-là. »

PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

Une des photos des statuettes larguées en 1994 lors du projet Migrations, faisant partie de la murale Fleuve mémoire.

Les trois caisses qui contiennent les 48 modules de photos de Fleuve mémoire étaient entreposées dans son atelier situé dans le bâtiment qui abritait jadis l’usine Rolland, à Sainte-Adèle. Lorsqu’il a voulu les retrouver, il n’en a vu qu’une seule. « C’est la première fois qu’une telle chose se produit en 60 ans de carrière, dit René Derouin. Mon atelier est là depuis 13 ans. J’ai toujours eu un assistant avec moi et parfois d’autres gens viennent m’aider pour les gros projets. J’ai toujours été en confiance. »

L’artiste de 86 ans ajoute qu’il n’a jamais remarqué d’entrée par effraction dans son atelier qui occupe tout un étage du bâtiment. « Je ne vois pas quel intérêt on pourrait avoir de voler deux des trois caisses, dit-il. Chaque caisse a 16 modules et chaque module est intéressant. Tu peux en mettre au mur, c’est très beau. Mais il n’y a pas de marché pour ça. »

PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

René Derouin devant son œuvre murale Fleuve mémoire

La murale Fleuve mémoire est une des œuvres phares de René Derouin. Elle a été exposée une première fois au Musée d’art contemporain de Baie-Saint-Paul, en 1994, puis au musée Glenbow, à Calgary, en 1998, au Musée des beaux-arts de Montréal, lors de sa rétrospective, en 1999, puis à la Grande bibliothèque de Montréal, en 2013.

René Derouin a porté plainte à la Sûreté du Québec en remettant aux policiers un dossier complet sur l’œuvre. « J’ai aussi parlé avec Alain Lacoursière [enquêteur de police durant 20 ans dans le domaine des crimes liés à l’art]. Quelque 8000 galeries vont être informées de cette disparition, ainsi qu’Interpol. Donc, s’il y a une circulation visuelle de ces modules, ce sera dénoncé. »

« Je n’aime pas le climat autour de ça, ajoute René Derouin. Mais j’aimerais bien qu’on me retourne cette œuvre-là qui est essentielle dans ma vie à cause du projet Migrations. Ensuite, je la remettrai au Musée d’art contemporain de Baie-Saint-Paul, en donation. »

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