Artiste en art cinétique, technologies et nouveaux médias, Diane Morin a connu une semaine exceptionnelle. Mercredi, elle était la lauréate du premier prix bisannuel en art actuel du Musée national des beaux-arts du Québec. Et, hier, elle recevait à Concordia le prix OEuvre de l'année pour la région de Montréal du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ).

Financé par la Fondation RBC, le prix inédit du MNBAQ est pourvu d'une bourse de 10 000 $, de l'organisation d'une expo solo au musée des plaines d'Abraham, d'une publication de nature rétrospective et de l'acquisition d'une ou plusieurs de ses oeuvres, soit un prix d'une valeur totale de 100 000 $.

« Il s'agit pour le musée de mettre en relief la production d'une artiste absolument investie dans son travail, qui témoigne de façon fascinante de certains enjeux technologiques, notamment la logique qui soutient les machines nous entourant », a dit Line Ouellet, directrice générale du MNBAQ.

Par ailleurs, Diane Morin a obtenu une bourse de 5000 $ du CALQ pour son oeuvre Imbrication (machine à réduire le temps), une réflexion sur l'histoire du cinéma présentée chez Circa en janvier-février 2013. Les deux prix qui lui sont décernés cette année coïncident à la fois avec ses 40 ans et ses 20 ans de pratique et honorent une démarche tournée principalement vers les technologies.

En 1998, l'artiste originaire de la région de Kamouraska a commencé ses créations d'installations technologiques et médiatiques dans lesquelles elles combinent l'informatique, le dessin, la lumière, le son et la robotique. Son oeuvre Imbrication est par exemple une installation qui présente une projection d'images d'arbres sur un écran grâce à une animation d'objets.

En voyant Imbrication, surgissent les premiers films des frères Lumière ou encore de Georges Méliès. Mais l'oeuvre de Diane Morin, d'une grande originalité, manipule le temps tout en résultant de ses expérimentations liées à la notion d'espace. Son installation comprend une série d'arbres miniatures placés sur trois rangées de rails entre l'écran et une série de lumières qui s'allument et s'éteignent à une fréquence et une vitesse variables. Grâce à un dispositif lumineux et à un moteur, l'écran diffuse ainsi différentes images des arbres devenus grands et animés.

Aux frontières du 7e art

La technique Morin, c'est aussi de montrer des images et en même temps la façon dont elles sont produites afin de démystifier son dispositif. « C'est important pour ne pas être seulement dans le lyrisme de la beauté de l'image et pour apporter un autre niveau de lecture », explique-t-elle à La Presse. Elle ajoute que la recherche pour la création de son oeuvre primée a été aussi longue que sa réalisation dans son atelier de Montréal.

« Je suis honoré de récompenser l'oeuvre de Mme Morin et de l'encourager à poursuivre son travail de création avec passion et détermination, a dit Christian O'Leary, directeur des communications et de la promotion des arts et des lettres au CALQ. Les membres du comité de sélection ont été séduits par sa démarche pertinente, approfondie et mature. »

Détentrice d'une maîtrise en beaux-arts de l'université Concordia, Mme Morin travaille depuis de longues années avec les ombres et la lumière. Elle a toutefois présenté, l'été dernier au Centre Clark, une oeuvre différente, Le grand calculateur, « sorte d'ordinateur fou » qui additionne des données. Une oeuvre qui porte un regard sur l'histoire de l'informatique.

Dans quelques semaines, Diane Morin partira près d'un mois en résidence d'artiste à Cologne pour une sorte de suite au Grand calculateur. Elle exposera, si tout va bien, une nouvelle installation sur l'île de Montréal d'ici la fin de l'année. Quant à Imbrication, il est possible qu'on puisse la revoir bientôt dans un contexte d'exposition. « Je ne peux rien confirmer pour l'instant », dit-elle. On peut voir quelques-uns de ses projets sur son site, dianemorin.net.