Art Dubaï, l'exposition d'art contemporain la plus importante du Moyen-Orient, a ouvert mercredi sa 3e édition annuelle dans un climat de morosité dû à la crise économique mondiale, mais elle pourrait aussi s'avérer bénéfique pour les amateurs d'art qui n'ont pas de gros moyens.

Des dizaines de galeries d'art proposent jusqu'au 21 mars leurs oeuvres à des milliers de visiteurs, collectionneurs et responsables de musées du monde entier, et plus spécialement des États-Unis, au cours de ce rendez-vous dont les précédentes éditions ont suscité un engouement sans précédent.

«J'ai dépensé six millions de dollars en trois ans pour l'acquisition d'objets d'art (...), que je ne veux plus revendre», a déclaré à l'AFP un collectionneur du Golfe.

«Je n'ai pas cherché à spéculer, car pour moi, contrairement à d'autres, une oeuvre d'art n'est pas comme un baril de pétrole, un bien immobilier ou une action en bourse», a-t-il ajouté sous couvert de l'anonymat.

Après des années d'investissements dans la Bourse et l'immobilier, la région a connu une vague de placements sur le marché de l'art, propulsant les prix à des niveaux record.

À l'origine de cet engouement, il y a les expositions Art Dubaï et Art Paris à Abou Dhabi, ainsi que les enchères publiques organisées par Christie's à Dubaï, qui ont donné un coup de fouet aux prix des oeuvres des artistes arabes et asiatiques.

Cette évolution sera-t-elle freinée par la crise économique mondiale qui a frappé Dubaï de plein fouet?

«L'impact de la crise est énorme, mais il n'est pas nécessairement négatif», a déclaré à l'AFP le directeur d'Art Dubaï, John Martin.

L'actuelle exposition «est plus grande que celle de 2008», avec la participation de 68 galeries de renommée mondiale exposant quelque 2000 oeuvres de 465 artistes, selon lui.

«Je ne suis pas sûr que les ventes atteindront le niveau de l'an dernier (...). Nous vivons dans un monde différent», a-t-il cependant ajouté, admettant que l'envolée des prix ces dernières années était alimentée par les spéculateurs qui, selon lui, «ont disparu du marché».

En 2008, l'exposition avait attiré 10 000 visiteurs et les ventes avaient atteint 20 millions de dollars, selon les organisateurs.

Avec «une tendance générale à la baisse des prix» de l'art, la crise aura ainsi ouvert le marché aux véritables amateurs d'art, qui n'ont pas tous beaucoup de moyens, a assuré M. Martin.

Mais cela doit amener les galeries et les expositions d'art à «s'adapter» à la nouvelle conjoncture économique.

«Les gens cherchent à investir dans des objets d'art de grande qualité. Ils préfèrent aussi s'adresser aux jeunes artistes» qui proposent des oeuvres de qualité à des prix raisonnables, a expliqué M. Martin, un Britannique qui partage son temps entre Londres et Dubaï.

De ce point de vue, selon lui, «la crise aura été bénéfique» pour le marché de l'art.

«En période de récession, les gens ont tendance à se détourner de tout ce qui est superficiel pour ce qui est plus profond, ce qui s'exprime le mieux dans l'art. Les gens aiment réellement l'art. Tout ne s'explique pas par l'argent», a-t-il souligné.

Pour lui, l'exposition pourrait aussi contribuer à changer les «clichés» sur Dubaï, une ville qui passe souvent pour un simple ensemble de tours et un centre d'affaires sans culture.

«Il y a beaucoup d'idées reçues sur Dubaï et (c'est la curiosité) qui a incité les artistes à venir à Dubaï», explique-t-il, citant sa propre expérience.