Le géant américain du commerce en ligne Amazon a enregistré une forte croissance au premier trimestre, mais ses marges restent très faibles, en partie car il investit à tour de bras, notamment dans le numérique et la vidéo en ligne.

Selon des résultats publiés jeudi, le chiffre d'affaires a bondi de 23% à 19,74 milliards de dollars, dépassant même un peu les attentes de Wall Street.

«Nous puisons notre énergie dans les inventions au profit des consommateurs, et 2014 a démarré avec énergie», a commenté le patron-fondateur, Jeff Bezos, dans un communiqué.

Il a cité quelques annonces récentes dans la vidéo en ligne: le lancement début avril de «Fire TV», un boîtier décodeur permettant de regarder sur un téléviseur des films et séries en streaming (flux sans téléchargement sur internet), «que les équipes travaillent dur pour garder en stock». Ou encore les droits exclusifs décrochés cette semaine pour diffuser en streaming pour les abonnés à son service Prime des séries populaires de la chaîne HBO, comme «Les Sopranos» ou «Six Feet under» («Six pieds sous terre»).

Cette dernière annonce améliore beaucoup l'attractivité de Prime face au service concurrent de vidéo en ligne Netflix, surtout que ce dernier vient d'annoncer des hausses de tarifs.

Amazon a aussi augmenté en mars le prix de Prime, mais celui-ci va du coup rester moins cher. Et son directeur financier, Thomas Szkutak, a assuré jeudi que cela n'empêchait pas le nombre d'abonnements de continuer à croître «de semaine en semaine».

Bénéfices anémiques

Les investissements massifs d'Amazon ont toutefois un coût.

L'accord avec HBO, dont les modalités financières n'ont pas été divulguées, aurait un prix estimé par les analystes et les médias spécialisés entre 100 et 270 millions de dollars par an.

Généralement, les dépenses d'Amazon en «technologies et contenus» ont grimpé de 44% au premier trimestre à 1,99 milliard de dollars.

Au final, le bénéfice net reste maigre malgré sa forte hausse (32% à 108 millions de dollars). La marge d'exploitation est quasi inexistante (+0,7%), et même négative à l'international.

Au deuxième trimestre, Amazon dit encore attendre au total une perte d'exploitation totale de 55 à 455 millions de dollars, pour un chiffre d'affaires entre 18,1 et 19,8 milliards.

Amazon ne se contente pas d'investir à tour de bras. Il vend à prix coûtant (certains disent même à perte) ses tablettes et liseuses électroniques Kindle, baisse régulièrement les tarifs de ses services d'hébergement en ligne utilisés par de nombreuses start-up et considérés par les analystes comme une source croissante de chiffre d'affaires.

Ecosystème digital

Pour Virginia Morris, analyste chez Daymon Worldwide, cela entre dans «une stratégie plus large», visant à «créer un écosystème digital (...) qui à long terme servira seulement à alimenter leurs activités de commerce».

L'idée est d'arriver à une série de services et de produits qui «où qu'on soit, au moment où on le désire, soient juste à portée de clic», indique-t-elle à l'AFP.

Wall Street a jusqu'ici semblé accepter ce pari à long terme, l'action Amazon touchant même un plus haut historique au-dessus de 400 dollars en janvier. Mais elle a reperdu quelque 17% depuis, certains commençant à s'interroger sur la durabilité du modèle.

La réaction aux résultats était d'ailleurs mitigée jeudi: dans les échanges électroniques suivant la clôture, l'action perdait 0,28% à 566,20 dollars vers 23H00 GMT.

«Sur la durée, ce sera difficile de maintenir ce niveau de croissance des ventes», reconnaît Virginia Morris.

Elle souligne malgré tout qu'Amazon fait des efforts sur la rentabilité ainsi que pour développer «de nouveaux modèles dans le commerce».

Elle évoque le service de livraison de produits frais «AmazonFresh», testé dans quelques villes américaines, ou le tout nouveau service «Pantry», permettant aux abonnés américains de Prime de se faire livrer à domicile pour un prix fixe de 5,99 dollars jusqu'à 20 kilos de produits de grande consommation non périssables, comme des boissons ou de la lessive.