Montréal sera-t-elle la première grande ville canadienne à réclamer au gouvernement fédéral l'imposition d'une taxe sur la vente des boissons sucrées? Deux élus montréalais veulent convaincre leurs collègues à l'hôtel de ville de réclamer une telle mesure à Ottawa afin de freiner l'épidémie d'obésité touchant le pays.

Le conseiller Marvin Rotrand et le maire d'Anjou, Lui Miranda, présenteront lundi une motion lors du prochain conseil municipal afin que la Ville de Montréal réclame au gouvernement fédéral d'imposer une taxe d'accise sur les boissons sucrées. Le document ne le précise pas, mais on espère une taxe de 20%, afin d'en assurer l'efficacité. Celle-ci serait payée directement par les producteurs et non au moment de la vente.

La motion appelle par ailleurs Montréal à «dénoncer les boissons sucrées comme facteur important dans les causes liées à l'obésité, les risques accrus de diabète de type 2, les maladies cardiovasculaires, le cancer et menant à un nombre de décès prévisibles significatifs chaque année au Canada».

Le conseiller Rotrand estime qu'une telle mesure serait plus efficace qu'une taxe locale. «Il suffirait de traverser la rue Atwater pour aller à Westmount afin d'éviter de payer», a-t-il illustré. D'autres pays l'ont fait et la mesure a fait ses preuves, ajoute-t-il.

Selon Marvin Rotrand, Montréal serait la première ville à faire une telle demande. Une motion similaire doit être présentée en janvier à Toronto où deux conseillers prévoient faire la même demande.

Marvin Rotrand se dit sûr que la motion sera adoptée, bien qu'une proposition similaire avait été rejetée en 2014. Projet Montréal, qui formait l'opposition à l'époque, l'avait appuyée, mais l'administration Coderre s'y était opposée. Denis Coderre s'était finalement prononcé en faveur d'une taxe sur les boissons sucrées durant la dernière campagne. Maintenant que Valérie Plante est mairesse, le conseiller de Snowdon croit que la motion sera adoptée.

L'administration Plante s'est dite ouverte à la proposition. La responsable du développement social, Rosannie Filato, a indiqué à La Presse que «c'est un enjeu de santé publique que nous étudions avec sérieux». Elle dit vouloir collaborer avec M. Rotrand «afin de bonifier sa motion. Puisqu'elle contient plusieurs éléments, nous l'évaluons pour qu'elle soit réaliste et applicable de façon graduelle.»

L'opposition officielle à l'hôtel de ville s'est dite favorable à la motion, mais proposera un amendement afin que les Villes touchent une part des revenus tirés de cette taxe sur les boissons sucrées. «En conseil, nous allons même proposer un amendement pour faire en sorte que les villes reçoivent une part des revenus de cette taxe, de façon à ce qu'elles puissent réinvestir ces sommes dans un fonds consacré aux saines habitudes de vie», a indiqué le chef de l'opposition par intérim, Lionel Perez, dans un message transmis aux médias.

La Coalition poids et la Fondation des maladies du coeur et de l'AVC ont apporté leur appui au conseiller Rotrand. «On trouve plus facilement une boisson sucrée qu'une fontaine d'eau, c'est très problématique», a déploré Corinne Voyer, directrice de la Coalition poids.

Bien que la santé ne relève pas des villes, celles-ci peuvent néanmoins jouer un rôle important sur la question, estime Kevin Bilodeau, directeur québécois des relations gouvernementales à la Fondation des maladies du coeur et de l'AVC. «Pour sauver des vies, on n'a pas besoin d'être médecin ou paramédical. Les politiciens fédéral, provincial et municipal ont un rôle à jouer», dit-il.

«Une Ville, ça ne sert pas juste à remplir des nids-de-poule», a souligné quant à lui Marvin Rotrand.