Le gouvernement va demander à un groupe d'experts de réfléchir sur les critères qui permettraient d'ouvrir l'aide médicale à mourir aux malades « inaptes », par exemple à cause de la maladie d'Alzeimer, qui ne sont pas capables de prendre des décisions les concernant.

Le ministre de la Santé, Gaétan Barrette a annoncé ce vendredi matin une démarche en trois points afin de rouvrir le débat sur les soins de fin de vie et de l'aide médicale à mourir. Ces démarches prendront au moins un an, prédit-il, et devraient, le cas échéant, se conclure par un vote libre - sans ligne de parti - à l'Assemblée nationale. La prudence impose une longue réflexion, insiste-t-il, ce débat ne peut être réglé d'un simple élargissement de l'aide médicale à mourir, après une commission parlementaire, comme le réclame la Coalition avenir Québec, a fait valoir M. Barrette, en point de presse, vendredi.

Québec va mandater « un groupe d'experts pour amorcer la réflexion sur les critères de l'aide médicale à mourir particulièrement pour les inaptes, et les demandes anticipées ». Jusqu'ici, la commission mise en place par Québec se prononce sur les demandes émanant de personnes jugées aptes à décider de leur sort. Les experts vont se pencher sur les cas où le patient n'est pas suffisamment lucide pour choisir d'accélérer son départ. Il n'est pas simple de trancher de ces situations, a insisté le ministre Barrette. Se tourner vers les personnes inaptes, « c'est un univers totalement différent ; l'Alzeimer, c'est progressif, qui va me dire où trancher ? Si des gens disent qu'ils ne veulent pas vivre alités 24 heures par jour, on peut le comprendre », a souligné le ministre.

Du même souffle, la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, va se tourner vers les tribunaux pour demander une clarification de la notion de « mort raisonnablement prévisible » prévue par la loi C-14. Beaucoup d'ordres professionnels, des avocats jusqu'aux médecins en passant par les infirmières, ont demandé au gouvernement une clarification de cette notion « inapplicable et inopérable parce que trop floue ». Les ordres peinent à établir des règles claires pour leurs membres, a expliqué M. Barrette. « Il est raisonnable de dire que tout le monde ici va mourir », a illustré M. Barrette.

Finalement, la commission chargée de se pencher sur les demandes d'aide médicale à mourir verra son mandat élargi. On lui demandera de se pencher sur les cas où l'aide demandée n'a pas été administrée finalement, à la demande du patient ou plus simplement refusée par la commission. Au moment où on demande d'élargir la portée de la loi, les cas qui se sont retrouvés dans cette zone grise apporteront une information importante pour les décideurs, a expliqué M. Barrette.

Actuellement, plus de 450 personnes ont demandé cette assistance médicale. Le gouvernement a été surpris du grand nombre de candidats. M. Barrette est convaincu que le caucus libéral est unanime derrière cette démarche « prudente », insiste-t-il.

Toute cette démarche « va prendre du temps, nous nous attendons pas à des résultats de la commission avant au moins un an. Le versant juridique va prendre un certain temps, le comité d'experts aussi, pas avant une période d'une année », a prévenu M. Barrette.

« Je suis convaincu que la société québécoise veut faire cette réflexion. Je ne crois pas qu'elle nous demande d'aller vite, mais de la façon la plus prudente possible. La population est prête à la réflexion. La population nous invite à une réflexion, on va la faire dans l'ordre », a souligné le ministre Barrette.

Pour la Coalition avenir Québec, François Paradis est d'accord avec une démarche « qui prendra le temps que cela prendra ». Il souhaite qu'il y ait, par la suite, une démarche publique, permettant à l'ensemble de la population de se prononcer. Avant la loi actuelle, une commission parlementaire avait reçu 260 mémoires. « Je demande aux collègues de comprendre que cela pourrait être long, plus d'un an, mais qu'on ne perde pas de vue que la réflexion devra se poursuivre jusqu'à sa conclusion ». La population souhaite que la loi aille plus loin, « il n'y a pas d'échéancier, mais il ne faut surtout pas qu'on arrête d'en parler », a souligné le caquiste de Lévis.