La campagne de vaccination contre la grippe a été un véritable échec, cette année. Des données publiées hier révèlent que le taux d'efficacité de la campagne de vaccination a été de 0% au Québec et ailleurs au Canada.

«C'est donc dire que cette année, les personnes qui ont reçu le vaccin et celles qui ne l'ont pas reçu ont eu le même taux de protection contre la grippe», affirme le Dr Gaston De Serres, médecin épidémiologiste à l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), qui a collaboré à l'étude.

Les données sur l'efficacité du vaccin contre la grippe ont été publiées hier dans la revue Eurosurveillance, l'une des références en matière de recherches sur les maladies infectieuses dans le monde.

Une décision de l'OMS

Chaque année, un comité de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) se réunit au mois de février pour déterminer quelles souches de la grippe seront incluses dans le vaccin de la saison suivante. «On se base sur les souches en circulation en février pour déterminer quel vaccin sera donné en novembre. Ça donne au virus le temps d'évoluer, et c'est ce qui s'est produit cette année», explique le Dr De Serres, qui ajoute que «ce qui a été choisi ne fonctionne pas du tout».

Alors que l'OMS avait prévu que les souches B et H1N1 de la grippe frapperaient cette année, c'est plutôt la H3N2 qui a touché la quasi-totalité des victimes au Canada.

Aux États-Unis, la situation est quelque peu différente, puisque le taux d'efficacité du vaccin a été de 23%. «C'est vraiment une mauvaise année», note le Dr De Serres.

C'est la première fois en 10 ans que le taux d'efficacité du vaccin est si bas au Canada. «C'est sûr que pour la population, ce n'est pas satisfaisant», note le Dr De Serres. Cette année, la campagne de vaccination a coûté 13 millions au Québec, précise la porte-parole du ministère de la Santé, Marie-Clause Lacasse.

Au Québec, la grippe a frappé tôt cette année. Durant le temps des Fêtes, les hôpitaux ont été envahis de patients atteints. À Montréal, des cliniques de grippe ont même dû être ouvertes. Selon les dernières données de l'INSPQ, 617 cas d'influenza se sont déclarés dans la semaine du 17 au 24 janvier. Le pic de l'activité grippale pourrait donc être passé, puisque dans la première semaine de janvier, plus de 2000 cas avaient été recensés.

Confiance ébranlée

Le Dr De Serres comprend que la confiance du public envers le vaccin contre la grippe sera ébranlée à la lumière des résultats de cette année. Mais, explique-t-il, la grippe continuera d'évoluer au cours des prochaines semaines. «La souche B pourrait arriver. La population vaccinée sera alors protégée», dit-il.

Selon le spécialiste, il est vrai que l'efficacité du vaccin contre la grippe est «toujours imprévisible». «Mais la plupart du temps, il y a une efficacité et les gens à haut risque de décès en cas d'influenza devraient continuer de se faire vacciner, dit-il. Sauf que là, la question que ça pose, c'est qu'on constate que le vaccin est toujours en retard sur la maladie. Il faut se relever les manches et développer un vaccin qui ne sera pas soumis à ce genre d'aléas.»

Dans l'étude d'Eurosurveillance, on explique que compte tenu du faible taux d'efficacité du vaccin, les personnes à risque, comme les personnes âgées ou immunosupprimées et les travailleurs de la santé, devraient «prendre des mesures de protection supplémentaires» pour se protéger de la grippe. Ils devraient notamment se laver les mains et éviter les contacts avec les personnes atteintes.

Comment le vaccin contre la grippe est-il conçu?

Un peu partout dans le monde, 141 centres de surveillance de l'influenza récoltent chaque année des données sur la grippe et sur les souches d'influenza en circulation sur leur territoire. Ces centres analysent également la façon dont le virus se répand et l'efficacité du vaccin sur les souches qui font leur apparition. En effet, les souches d'influenza en circulation évoluent constamment.

Ces données sont envoyées régulièrement à l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Tous les ans, en février, l'OMS utilise ces informations pour établir ses prévisions pour la saison suivante et nommer les souches d'influenza qui devraient selon elle se retrouver dans les futurs vaccins.

L'OMS publie des recommandations pour l'hémisphère Nord et pour l'hémisphère Sud.

Les pays se basent ensuite sur les recommandations de l'OMS pour déterminer quelles souches devront se retrouver dans les vaccins qui seront commercialisés sur leur territoire.

Généralement, de trois à quatre souches différentes du virus de l'influenza entrent dans la composition du vaccin. On parle alors de vaccin trivalent (trois souches) ou quadrivalent (quatre souches).

Cette année, huit vaccins trivalents et deux vaccins quadrivalents ont été homologués au Canada. Le vaccin peut être administré par voie injectable ou par voie intranasale.

Au Québec, les jeunes enfants, les personnes atteintes de maladies chroniques, les femmes en fin de grossesse et les personnes âgées de plus de 60 ans, notamment, peuvent se faire vacciner gratuitement tous les ans.