Depuis 2008, le nombre de jeunes admis au Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine pour des troubles alimentaires n'a cessé d'augmenter: en quatre ans, le nombre de ces hospitalisations a bondi de 44%.

En 2008, 83 jeunes ont été hospitalisés à Sainte-Justine pour anorexie dans les départements de pédiatrie ou de psychiatrie. Par la suite, chaque année, ce chiffre a grimpé pour atteindre les 120 hospitalisations l'an dernier.

Le Québec suit donc une tendance observable à l'échelle canadienne, puisque l'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS) a révélé la semaine dernière que le nombre de femmes de moins de 20 ans hospitalisées pour des troubles alimentaires dans le reste du Canada est en hausse de 42% depuis 2006. Ces données dévoilées par l'ICIS excluaient cependant le Québec.

L'hôpital Sainte-Justine n'était pas en mesure de fournir l'âge moyen de ses patients. Mais les médecins observent que la maladie touche des enfants de plus en plus jeunes. Il n'est pas rare de voir des fillettes de 11 ou 12 ans être hospitalisées. Régulièrement, les médecins traitent aussi de jeunes garçons atteints de troubles alimentaires, qui représenteraient 10% des patients, selon des données de l'Institut Douglas.

«La détresse et la peur de devenir gros sont aussi intenses chez un garçon atteint. Mais la maladie est aussi vécue dans la honte parce que c'est considéré comme une maladie de fille», souligne la Dre Danielle Taddeo, pédiatre à Sainte-Justine et chef de la médecine de l'adolescence.

Pourquoi une telle augmentation de cas? «Il y a de la génétique, de l'environnement, la contagiosité des images. Avant, on feuilletait une revue et on était complexés, mais là, les images viennent de toutes parts», souligne la Dre Taddeo.

Les campagnes contre l'obésité ont-elles l'effet pervers de pousser certains jeunes vers l'anorexie? «On n'a pas de preuves, mais c'est sûr qu'il y a des risques à ces campagnes. Ça se rend jusque dans les cours d'éducation physique, où on pèse et on mesure les jeunes. Il va falloir apporter des nuances à ces campagnes», croit la Dre Taddeo.

Pour qu'un jeune soit hospitalisé à cause de troubles alimentaires, sa santé doit être clairement compromise. En plus d'un amaigrissement important, la tension artérielle de ces jeunes patients est souvent très basse, leur taux de potassium est peu élevé et le rythme cardiaque se situe généralement sous les 50 battements par minute. La détresse psychologique de ces jeunes est également très présente - certains sont allés jusqu'à la tentative de suicide.

Après une ou deux semaines d'hospitalisation, leur état physique s'améliore, mais ils demeurent en moyenne six semaines à l'hôpital. «On n'attend pas la guérison complète pour donner le congé. Le rétablissement est beaucoup plus long, mais c'est possible!», tient à souligner la Dre Taddeo.