Il y a de plus en plus d'enfants et d'adultes autistes au Québec. La ministre déléguée à la Santé et aux Services sociaux, Véronique Hivon, n'hésite pas à qualifier le phénomène de tsunami qui allonge encore plus les listes d'attente dans les services de réadaptation.

«Il y a une augmentation de la prévalence de l'autisme qui est très, très importante. Ça double depuis dix ans à chaque quatre ans. On est à 1% des enfants chez qui on diagnostique un trouble du spectre de l'autisme. Le boum est plus important dans certaines régions», a-t-elle affirmé au cours d'une entrevue au Soleil.

Les données de la Régie des rentes quant au nombre d'enfants déclarés handicapés pour un trouble envahissant du développement confirment l'énorme vague. En 2005, on comptait 3473 jeunes de moins de 18 ans qui recevaient un supplément mensuel. Sept ans plus tard, ce chiffre a bondi à 7330 enfants.

Selon la Dre Chantal Caron, chef du programme autisme à l'hôpital Rivière-des-Prairies, à Montréal, ce bilan est encore plus lourd. Il n'inclut pas tous les enfants autistes. «La Régie ne remet pas en question les diagnostics. Elle a augmenté ses critères pour donner le supplément parce qu'il y avait beaucoup de demandes et que le budget était serré», a-t-elle avancé.

Meilleur dépistage

À son avis, plusieurs facteurs expliquent la hausse fulgurante des cas d'autisme, dont un meilleur dépistage. Auparavant, les autistes étaient davantage associés à de la déficience intellectuelle. «On les dépiste plus facilement parce qu'on est plus aguerri. Nos CLSC, CSSS et les écoles sont plus éveillés sur l'autisme. En plus, les critères diagnostiques des psychiatres ont été élargis», a expliqué la médecin. La Dre Caron a travaillé pendant 17 ans à l'hôpital du Sacré-Coeur à Québec avant de se diriger dans la métropole.

Elle croit par ailleurs que les intervenants sont plus portés à référer les enfants en autisme étant donné qu'il y a plus de services qu'en déficience intellectuelle. Depuis quelques années, des jeunes avec des troubles de langage sont maintenant considérés comme autistes.

«On n'a pas de facteurs environnementaux qui ont été mis en évidence actuellement pour expliquer l'augmentation. Il y a eu l'époque, vers 2000 où un charlatan avait dit que c'était le mercure contenu dans un vaccin qui causait l'autisme. On a compris par la suite que c'était un charlatan. Malheureusement, cela a eu tout un impact négatif parce que les parents n'ont pas fait vacciner leur enfant», a déploré la Dre Caron.

Une priorité pour la ministre

La ministre Hivon entend multiplier les efforts pour réduire les listes d'attente pour des services aux enfants et aux adultes autistes. «Pour moi, c'est une priorité, pour ne pas dire une obsession. On ne peut pas revirer la situation en 48 heures, mais je vois des améliorations encourageantes avec de meilleures pratiques», a-t-elle affirmé.

Elle a rappelé les constats dévastateurs contenus dans le dernier rapport du vérificateur général sur les lacunes importantes dans la gestion des services aux autistes. «On a ramassé une situation où les mesures n'ont pas été mises en place pour prévoir ce qui s'en venait. J'ai l'impression que dans les dernières années, on essayait de sous-estimer le problème. Aujourd'hui, il n'y a rien de tout ça qui est sous-estimé.»

À son avis, des changements doivent être apportés afin que les intervenants passent moins de temps à la gestion de cas. De plus, la ministre estime que la part des ressources accordée aux troubles graves de comportement est disproportionnée. «On ne niera jamais que l'argent peut améliorer les choses, mais je pense aussi que les manières de faire, la performance, l'efficacité dans l'intervention, sont aussi des manières de réduire les délais d'attente», a-t-elle soutenu.