Les faussaires n'ont aucune pitié pour les personnes atteintes de maladies graves. Leur nouvelle manne : les médicaments destinés aux cancéreux et aux sidéens. Ce sont souvent des remèdes très en demande, en rupture de stock ou au prix exorbitant. En les falsifiant, les trafiquants empochent des millions. Des centaines de médecins et de pharmaciens avides se font leurs complices en Amérique du Nord. Et des sociétés canadiennes sont souvent impliquées.

CANCER

> Perdre sa Jaguar (2013)

Un Floridien, Martin Paul Bean III, a admis avoir vendu pendant six ans au moins cinq faux médicaments anti-cancer achetés en Inde, en Turquie et au Pakistan. Il sollicitait les médecins par fax, leur offrant des rabais de 30 % à 60 %, ce qui lui a permis d'empocher 7 millions de dollars. Son centre d'appel, GlobalRxStore, était situé à Winnipeg. Le trafiquant, qui attend de connaître sa peine, a remis sa Jaguar à l'État.

Sept oncologues de l'Ohio sont aussi poursuivis pour avoir acheté ses produits.

> 500 $ de rabais (2012)

Au moins 19 cliniques américaines ont acheté du faux Avastin, vendu par un distributeur douteux après avoir transité dans différents endroits aux quatre coins du monde. Censé traiter le cancer du côlon, du poumon, des reins ou du cerveau, le faux remède ne contenait pas d'ingrédient actif.

Londres a alerté Washington en découvrant qu'un Britannique, Richard J. Taylor, exportait une version turque du traitement. L'homme de 58 ans a été condamné à 18 mois de prison et à remettre 4 millions de dollars à l'État.

Son intermédiaire américain, Paul Bottomley (lié au site manitobain Canada Drugs), a remis 4,5 millions additionnels. Il vendait chaque flacon de faux Avastin 1700 $ plutôt que les 2300 $ habituels. Plusieurs médecins ont profité de ce rabais et néanmoins réclamé le plein tarif aux compagnies d'assurances.

> Un entrepôt clandestin (2012)

Au Tennessee, le médecin et administrateur d'un centre d'hématologie-oncologie, William Kincaid, a déboursé plus de deux millions pour acheter une dizaine de faux médicaments de chimiothérapie. Lorsqu'une infirmière s'est étonnée de l'apparence inhabituelle de leur emballage, Kincaid et ses collègues ont commencé à les faire livrer dans un entrepôt, avant de les mêler aux stocks de vrais médicaments. Le médecin, qui vient d'être condamné à deux ans de prison, faisait affaire avec une société canadienne, Quality Specialty Products (QSP), laquelle s'approvisionnait à l'étranger.

> Une substance visqueuse (2010)

Un oncologue du Missouri, Abid S. Nisar a acheté à 47 reprises des médicaments frauduleux contre le cancer. Il voulait profiter de rabais. Le médicament, qui devait être gardé froid, a semblé suspect à une infirmière qui a observé que la substance semblait « visqueuse » et a alerté les autorités.

> Dilué dans de l'eau (2003)

À Miami, le faussaire José Grillo a empoché 28 millions en vendant à plusieurs distributeurs quelque 11 000 boîtes de Procrit contrefait, un médicament prescrit aux cancéreux et aux gens en dialyse pour traiter leur anémie sévère. L'homme avait réétiqueté les bouteilles pour faire croire qu'elles contenaient le dosage maximal plutôt que minimal. Pendant plus d'un an, ces flacons frauduleux ont été vendus dans les pharmacies et les hôpitaux dans tous les États-Unis.

> 2,2 milliards de dommages (2002)

Qualifié de « tueur en série » par l'avocat d'une victime, un pharmacien de Kansas City, Robert Ray Courtney, a acheté des médicaments contre le cancer à l'étranger et a dilué 98 000 ordonnances pour tripler ses profits. Tandis qu'il amassait 19 millions en 10 ans, 4200 patients de 400 médecins ont reçu des doses de chimiothérapie insuffisantes.

Quelque 450 victimes l'ont poursuivi. En 2002, un jury a accordé 2,2 milliards à l'une d'elles, Georgia Hayes, atteinte du cancer des ovaires.

Eli Lilly et Bristol-Myers Squibb ont parallèlement réglé à l'amiable un différend avec 350 patients lésés. Un représentant de la première société avait en effet remarqué que Courtney vendait trois fois plus de doses qu'il n'en achetait, et n'a pas alerté le FBI. C'est une infirmière qui s'en est chargée en l'entendant en parler.

En condamnant Courtney à 30 ans de prison et 10,5 millions d'amende, après avoir entendu des dizaines de témoins anéantis, le juge a déclaré : «Vos crimes choquent la conscience civilisée.»

VIH/SIDA

> Argent facile (2012)

Deux pharmaciens new-yorkais, Glenn Schabel et Ira Gross, ont été arrêtés pour avoir vendu de faux médicaments contre le VIH, les avoir revendus à des patients pendant quatre ans et avoir fait de fausses factures pour réclamer le plein tarif au système de santé. Valeur totale des ventes :  274 millions. La poursuite affirme qu'« ils se sont attaqués aux plus vulnérables de tous les patients dans le seul but de faire de l'argent facile ».

> Avec de l'essence (2011)

Un New-Yorkais a été condamné à six mois de prison parce qu'il s'est servi d'essence à briquet pour décoller les étiquettes de pseudo médicaments contre le VIH valant plus de 2 millions. Alertée par les voisins, surpris de l'odeur étrange émanant de son appartement, la police a découvert des fioles empilées jusqu'au plafond.

> En Californie (2001)

Du faux Serostim, un injectable qui ralentit la perte musculaire, a été découvert dans deux pharmacies californiennes.

AUTRES MALADIES

> Insuffisance rénale (2012)

Au Tennessee, le pharmacien Robert Harshbarger junior a vendu pendant cinq ans, à des centres de dialyse, une solution injectable de fer achetée à rabais à des firmes chinoises de produits chimiques (et non pharmaceutiques). Il voulait accroître ses profits.

> Cholestérol (2005)

Au Missouri, les dirigeants du distributeur Albers Medical ont été poursuivis pour avoir vendu du faux Lipitor aux pharmacies. Ils avaient payé pour le faire réemballer et 18 millions de comprimés ont dû être rappelés.

> Schizophrénie (2003)

Des comprimés de Zyprexa ont été remplacés par des aspirines dans quatre États.