Caroline, qui habite dans l'est de Montréal, a appris que son fils de 16 ans était accro au speed lorsqu'elle l'a emmené chez le dentiste. Caries innombrables, gencives abîmées: l'adolescent a fini par tout lui avouer. «Réparer les dégâts m'a coûté 3000$», dit-elle.

Professeur en toxicomanie, le Dr Jean-Marc Pépin connaît la chanson. Sous l'effet des amphétamines, les vaisseaux sanguins se ferment, dit-il, et les tissus, moins irrigués, se régénèrent moins vite. «On a aussi beaucoup plus de psychoses toxiques avec le speed qu'avec la cocaïne», ajoute-t-il.

Fort consommateur pendant 3 ans (10 pilules chaque soir de week-end), William en a bavé. Ulcères aux gencives, douleurs aux mâchoires (qu'il serrait de toutes ses forces sans pouvoir s'en empêcher), rhumes (puisque son système immunitaire était affaibli), arythmie cardiaque (qui perdure)... «D'après le médecin, ça devrait cesser quand j'aurai arrêté depuis assez longtemps», dit le garçon de 17 ans.

Pour le reste, les choses se sont replacées. «Avec le speed, j'avais peur de mourir. Je faisais de grosses crises d'angoisse dès que je n'étais pas gelé. Je n'arrivais plus à dormir.»

Lorsque l'effet de cette drogue se dissipe, «on dirait que ça ronge tes os, carrément», a résumé un autre jeune, interrogé par le professeur de psychoéducation Jean-Sébastien Fallu. «Tu ne te rappelles pas grand-chose de la veille», a dit un autre.

Après des années d'abus, les troubles de concentration ou de l'humeur et la perte d'énergie peuvent s'installer pour de bon, indique le Dr David Luckow, qui travaille au centre Dollard-Cormier et au CLSC Côtes-des-Neiges. «Il faudrait toutefois des doses industrielles (ou un problème médical sous-jacent) pour risquer la mort», nuance-t-il.

En théorie, les amphétamines sont beaucoup moins nocives que les méthamphétamines, qui en sont dérivées. Malheureusement, les saisies de la Gendarmerie royale du Canada ont révélé que le speed que consomment les jeunes contient généralement cette deuxième substance, plus puissante, révèle M. Fallu. «Si la méthamphétamine n'est pas inhalée, ses dangers sont moins grands, dit-il, mais elle reste plus susceptible de créer une accoutumance.»

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Un stimulant qui rend accro

Comme l'ecstasy, les amphétamines et les métamphétamines sont des molécules chimiques fabriquées dans des laboratoires clandestins. Ce sont des stimulants. Elles augmentent l'énergie et la vigilance, désinhibent, coupent l'appétit et donnent l'illusion de décupler les capacités physiques et intellectuelles. Le speed que consomment les jeunes contient généralement de la métamphétamine, qui coûte moins cher à produire, est plus puissante et plus susceptible de rendre dépendant (speed, wake-up, peanut, peach, pep, upper). L'effet dure quelques heures. Il libère de la dopamine dans le cerveau, ce qui procure une sensation de plaisir.