En commençant sa deuxième journée de délibérations, hier, le jury chargé de décider du sort de l'ex-juge Jacques Delisle a demandé à réécouter le témoignage d'un témoin de la défense: celui de Marjolaine Castonguay, femme de ménage du couple.

Mme Castonguay a témoigné le 24 mai au procès de M. Delisle, accusé du meurtre prémédité de sa femme. La victime alléguée, Marie-Nicole Rainville, 71 ans, paralysée du côté droit, est morte le 12 novembre 2009 d'une balle à la tête dans le condo qu'elle occupait avec son mari, à Sillery.

La Couronne soutient qu'il s'agit d'un meurtre, alors que la défense allègue que c'est un suicide.

Lors de son témoignage, qui a duré une vingtaine de minutes, Mme Castonguay a raconté qu'elle faisait le ménage chez le couple depuis 2008. Elle s'y rendait toutes les deux semaines, le mercredi, et restait sur place de 8h à midi. La dernière fois qu'elle a vu Mme Rainville, c'était le 4 novembre 2009, soit huit jours avant sa mort. Mme Rainville était revenue à la maison depuis peu (le 30 octobre), après une hospitalisation de quatre mois en raison d'une hanche fracturée. Le 4 novembre, Mme Castonguay a dit à Mme Rainville qu'elle était bien contente qu'elle soit de retour à la maison.

«Peut-être pas pour longtemps», a répondu Mme Rainville.

Cette phrase ne veut pas nécessairement dire qu'elle songeait à mettre fin à ses jours, car Mme Rainville réfléchissait à la possibilité d'aller vivre en résidence adaptée à cette époque.

Quoi qu'il en soit, selon le témoin, Mme Rainville était assise sur le fauteuil ou le canapé, et ne s'est pas déplacée, ce jour-là. Elle est restée dans le salon. Mais avant de se fracturer la hanche (en juillet 2009), Mme Rainville se déplaçait dans la maison avec une canne, de la chambre à la cuisine, selon Mme Castonguay. Elle apportait même son déjeuner à table.

Ce détail a son importance, puisque Mme Rainville n'avait qu'une seule main valide. Si elle était capable d'apporter son déjeuner, on pourrait supposer qu'elle aurait été capable d'aller chercher l'arme à feu, qui se trouvait sur une table à l'entrée, et l'apporter jusqu'au canapé pour se tuer. C'est du moins ce que la défense a laissé entendre.

Le jour du drame, l'accusé avait soutenu qu'il gardait son arme chargée, dans une boîte, sur une petite table à l'entrée du condo. Questionnée par la Couronne à ce sujet, Mme Castonguay avait pour sa part répondu qu'elle n'avait jamais vu d'arme à feu dans une boîte.

Mme Castonguay a aussi témoigné sur l'état d'esprit de Mme Rainville. Elle n'acceptait pas son état, parfois elle voulait dire quelque chose et les mots ne sortaient pas comme elle le voulait. Elle a dit un jour qu'elle «serait bien mieux morte». Mme Castonguay a aussi dit que M. Delisle s'occupait bien de sa femme. Il l'aidait à faire sa toilette. «Une fois que sa toilette était faite, il n'y avait pas grand-chose à faire. Il allait faire des commissions», a raconté Mme Castonguay.

Il est impossible de savoir si le jury cherchait une information précise dans la réécoute de ce témoignage. Rappelons que les huit hommes et quatre femmes doivent choisir entre trois verdicts: coupable de meurtre prémédité, de meurtre non prémédité, ou non coupable. Le procès a débuté le 7 mai, et le jury est en délibérations depuis mardi matin.