Roméo Phillion, qui a passé plus de 30 ans derrière les barreaux pour un meurtre qu'il n'avait pas commis, poursuit ceux qui, selon lui, sont responsables de cette erreur judiciaire pour un montant total de 14 millions de dollars.

M. Phillion poursuit le procureur général de l'Ontario, la Commission des services policiers d'Ottawa et deux policiers.

Dans sa poursuite, il les accuse de conduite malicieuse et négligente qui a mené à sa condamnation et à sa longue peine de prison en lien avec le meurtre d'un pompier d'Ottawa en 1967.

M. Phillion affirme que la police a manipulé des témoins pour soutenir une fausse confession qu'il a rapidement rétractée, malgré le fait que les autorités savaient qu'il ne se trouvait pas à Ottawa au moment du meurtre.

Son avocat, David Robins, soutient que les sommes substantielles réclamées n'offriraient qu'une compensation partielle à son client âgé.

«Aucune somme compensatoire ne peut faire reculer le temps et corriger le tort causé à M. Phillion et l'erreur judiciaire dont il a souffert», a-t-il lors d'une entrevue téléphonique.

«Nous espérons cependant que si nous remportons le procès et sommes en mesure de récupérer un montant d'argent substantiel pour M. Phillion, cela lui permettra de vivre le restant de ses jours dans un certain confort.»

Les parties défenderesses n'ont pas immédiatement commenté la poursuite.

M. Phillion avait été condamné à la prison à vie en 1972 pour le meurtre de Léopold Roy, mais la Cour d'appel de l'Ontario a annulé sa condamnation en 2009.

Sa saga judiciaire a débuté en 1967 lorsque Léopold Roy a été poignardé à mort. M. Phillion se trouvait lui-même à plusieurs centaines de kilomètres de là au moment du crime, un fait établi dans un rapport de police rédigé plusieurs mois après que le pompier eut été tué. M. Phillion a donc été retiré de la liste des suspects, mais est réapparu en 1971 lorsqu'il a été arrêté dans une affaire de vol sans lien avec le meurtre. Alors qu'il se trouvait entre les mains de la police, Me Robins a expliqué que M. Phillion avait admis avoir tué M. Roy, pour se rétracter quelques heures plus tard.

La poursuite intentée par M. Phillion allègue que la police a immédiatement commencé à manipuler des témoins pour corroborer la confession et n'a pas fait mention des preuves précédentes qui auraient mené à son innocence.

Emprisonné depuis 1972, M. Phillion n'a appris l'existence du rapport l'exonérant du crime qu'en 1998, lorsque son avocat l'a reçu en compagnie d'autres documents liés à l'affaire.

Un juge a accepté de libérer M. Phillion sous caution en 2003, 31 ans après sa condamnation.

Les allégations contenues dans la poursuite n'ont pas été prouvées en cour et la défense n'a pas présenté de déclaration.