David Abitbol est-il un dangereux psychopathe sur le point de laisser exploser sa folie meurtrière? Ou seulement un être «immature dont les paroles ont excédé la pensée»?

Le juge Robert Marchi devra choisir lequel de ces deux portraits - le premier dressé par la Couronne; le second, par la défense - correspond au jeune homme de 28 ans dans la longue enquête sur sa mise en liberté, qui s'est terminée hier au palais de justice de Montréal.

David Abitbol a brièvement témoigné, hier, pour dire qu'il était prêt à renoncer à sa passion pour les armes à feu et les jeux en ligne si le juge Marchi lui rend sa liberté. «Après avoir entendu les faits (qui me sont reprochés), oui, j'ai dit des affaires affreuses, et oui, ça pourrait m'aider de voir un psychiatre pour m'améliorer», a-t-il reconnu.

Pas de maladie mentale

L'accusé est un jeune homme «immature» au «jugement limité» qui a tendance à tenir des propos exagérés pour provoquer, attirer l'attention et «jouer au dur», selon Thierry Webanck, criminologue à l'institut Philippe-Pinel, qui a témoigné à la demande de la défense. À son avis, même si David Abitbol dit voir des lutins, il ne semble pas souffrir de maladie mentale.

L'accusé, dont le pseudonyme sur l'internet est Darkiller, a plutôt des problèmes d'adaptation sociale, selon le criminologue. À 28 ans, il vit toujours chez ses parents et n'a nullement l'intention de quitter le nid familial. Il est à ce point couvé qu'il a besoin que sa mère vienne le réveiller tous les matins.

Lors de son arrestation, le 2 octobre dernier, les policiers ont découvert cinq armes à feu, dont un pistolet de calibre .45 sous son matelas, et des munitions en grande quantité. Il travaillait alors comme assembleur dans une usine de climatiseurs à Anjou.

Les parents de David Abitbol se sont portés à la défense de leur fils au lendemain de son arrestation en déclarant aux médias qu'il s'agissait d'une «grosse gaffe de la police». La mère du jeune homme, Michelle, a changé de ton, hier, lors de son témoignage devant la Cour.

«Ce qui m'a paru le plus inquiétant, c'est qu'il soit arrêté pour menaces de mort», a-t-elle dit. Elle a qualifié de «surprenants, bouleversants et sérieux» les propos qu'a tenus son fils sur Facebook. Toutefois, elle ne s'est jamais inquiétée du fait qu'il possède autant d'armes à feu et fréquente assidûment un club de tir. Après tout, le tir est un sport, a-t-elle ajouté.

David Abitbol est accusé d'avoir proféré des menaces de mort sur l'internet envers trois anciennes enseignantes et un ancien camarade de classe, d'entreposage illégal d'armes à feu et de possession de pornographie juvénile.

Pas un dossier ordinaire

Aux yeux de la Couronne, il doit rester détenu pour ne pas miner la confiance de la société envers l'administration de la justice et pour ne pas compromettre la sécurité du public. «Ce n'est pas un dossier ordinaire de menaces. Dans des conversations sur l'internet qui durent près de neuf heures avec le même interlocuteur, l'accusé revient souvent sur ses idées d'homicides. Ça va au-delà de la blague immature», a plaidé le procureur de la Couronne, Steeve Larivière, hier.

De son côté, la défense estime que David Abitbol bénéficierait d'un «encadrement solide» s'il retournait vivre chez ses parents. «Que M. Abitbol soit un dangereux psychopathe qui va exploser dans une folie meurtrière n'est que pure spéculation», a plaidé Me Charles Benmouyal. Son client n'a pas d'antécédents judiciaires et est «beaucoup plus immature que dangereux», a-t-il soutenu. Le juge Robert Marchi décidera s'il rend sa liberté à l'accusé mardi prochain.