Les Québécois n'en ressentent pas cruellement les effets, mais ils n'apprécient pas le menu austérité du gouvernement Couillard. Ils ne se bousculeront pas pour appuyer les syndicats s'il y a un mouvement de grève à l'automne, mais ils restent amers devant cette opération, convaincus que certains groupes sont injustement épargnés par les compressions.

À grands traits, CROP brosse un tableau de l'électeur québécois après la vague d'austérité des derniers mois. L'enquête, effectuée du 15 au 20 avril, démontre que 63 % des gens auraient préféré que Québec reporte d'une année l'atteinte du déficit zéro. Sans surprise, les péquistes et les supporters de Québec solidaire sont de cet avis, à respectivement 81 et 90 %. Fait étonnant, toutefois, 73 % des caquistes pensent aussi qu'il aurait mieux valu attendre un an de plus.

Un Québécois sur trois estime avoir été « beaucoup » frappé par les mesures d'austérité. La moitié des gens (47 %) estiment avoir été « un peu » touchés, tandis que l'opération s'est révélée sans douleur pour 21 % des gens. Ici, 56 % des supporters du Parti libéral (PLQ) se sont sentis touchés partiellement, tandis que la pilule a été plus amère pour 56 % des supporters de Québec solidaire et 48 % des péquistes.

C'est l'inéquité des compressions qui frappe. Pas moins de 87 % des gens pensent que tout le monde n'a pas apporté sa juste contribution à l'atteinte de l'équilibre ; on atteint même 90 % chez les électeurs caquistes. « Le problème est que les gens n'ont pas l'impression qu'il y a une justice, ils ont l'impression que tout le monde sauf eux ont un gros fonds de pension, que tout le monde peut accumuler des congés de maladie à plus finir, que tout le monde sauf eux prennent des vacances tandis qu'ils sont écrasés par les hausses de tarifs », explique Youri Rivest, vice-président de CROP.

Dans l'éventualité d'une mobilisation syndicale à l'automne, les Québécois sont très partagés ; ceux qui appuient le mouvement, ceux qui s'y opposent et ceux qui y sont indifférents forment trois groupes à peu près égaux. Les supporters du PLQ sont clairement contre, à 63 %, tandis que les péquistes et les caquistes sont plus partagés.

Une hausse trompeuse

En ce qui concerne les intentions de vote, le PLQ paraît faire un bond important, passant de 29 % à 34 % en un mois. Selon Youri Rivest, il faut toutefois nuancer cette donnée : 34 % est proche de la moyenne des mois qui ont précédé la lecture de mars. Aussi, le précédent sondage reflète probablement la turbulence qui a entouré la démission d'Yves Bolduc de son poste de ministre de l'Éducation.

Satisfaction

CROP observe que 37 % des gens sont favorables à ce que Québec vise l'équilibre budgétaire dès cette année. La proportion des gens satisfaits du gouvernement est semblable, à 39 %, soit deux points de plus qu'il y a un mois. Les insatisfaits ont baissé aussi de 2 %, à 57 %.

QS en baisse

Pour les autres partis, c'est le calme plat. Le Parti québécois (PQ) reste à 27 % comme en mars, tandis que la Coalition avenir Québec (CAQ) subit une baisse marginale d'un point, passant à 25 %. Québec solidaire passe subitement de 16 à 12 %. « Leur score de mars était plus élevé que d'habitude. Cela aurait pu voir une lancée, ce n'est pas le cas. Peut-être que leur position en faveur des manifestations étudiantes leur aura nui », risque Youri Rivest.

Le meilleur PM

Peut-être regrettera-t-il de ne pas être dans la course. Bien qu'intérimaire, le chef péquiste Stéphane Bédard a fait un bond de trois points comme « meilleur premier ministre », passant de 7 à 10 %. Philippe Couillard gagne deux points, à 22 %, mais il en avait perdu quatre le mois précédent. Pour Youri Rivest, ce score reste bien modeste pour le chef du PLQ compte tenu des intentions de vote acquises à son parti. François Legault marque le pas, passant de 21 à 20 %.