Le gouvernement fédéral envisage d'ouvrir une base de données de plus de 9000 dossiers afin de permettre à des familles inuites de se renseigner sur des proches décédés lors des éclosions de la tuberculose du milieu du XXe siècle.

Le premier ministre Justin Trudeau, qui se rend cette semaine à Iqaluit, devrait expliquer le fonctionnement de la base de données, jeudi, alors qu'il présentera des excuses au nom du gouvernement pour les mauvais traitements infligés aux Inuits pendant les épidémies.

La base de données aidera pour la première fois les familles inuites du nord du Canada à contacter des représentants au sein de leurs organisations de revendication territoriale, qui pourront les aider à mener une enquête approfondie pour déterminer ce qui est arrivé à leurs proches.

« Nous savons que nous ne pourrons pas trouver tout le monde », a affirmé une source au fait de l'annonce devant être effectuée cette semaine, qui a parlé sous le couvert de l'anonymat, car des éléments n'ont pas encore été rendus publics.

Des documents de la base de données pourraient conduire les personnes concernées à une impasse, « mais certains pourraient conduire à de véritables tombes ».

Les excuses et la base de données font partie d'un processus appelé Nanilavut, qui signifie « trouvons-les » en inuktitut.

L'objectif est d'aider les Inuits à retrouver les lieux de sépulture des membres de leur famille qui ont été transportés dans le sud du Canada pour y être soignés contre la tuberculose entre les années 1940 et 1960.

L'Association canadienne de santé publique a estimé qu'environ le tiers de la population inuite du Canada a été infecté au cours des éclosions.

Nombre de ceux qui sont décédés n'ont jamais été rendus à leurs familles, mais ont été enterrés dans des parcelles non marquées.

La recherche de parents a commencé en 2008 lorsqu'une famille du Nunavut s'est lancée dans l'espoir de retrouver un proche qui a été emmené dans le sud pour y être soigné.

Nunavut Tunngavik, l'organisation qui représente les Inuits du Nunavut, a contacté le gouvernement fédéral, qui a commencé peu après à révéler de nouvelles informations sur d'autres cas d'Inuits décédés mais dont les corps n'avaient jamais été renvoyés dans le nord.

Un groupe de travail a été formé et depuis lors, les quatre organismes représentant les Inuits au Canada ont rassemblé autant d'informations qu'ils pouvaient trouver.

La base de données contient maintenant plus de 9000 dossiers, y compris des documents hospitaliers et des enregistrements de transport, mais la plupart des informations sont incomplètes.

« Certains [des documents] sont des listes de noms ; d'autres pourraient être des doublons ou plusieurs enregistrements pour la même personne avec des noms épelés de différentes manières », a indiqué une autre source, qui a également parlé sous le couvert de l'anonymat avant l'annonce officielle.

« Dans certains cas, il y aura des noms. Dans certains cas, les personnes seront identifiées par leur numéro "E" », a-t-elle souligné.

Les chiffres « E » - ou parfois « W » - étaient ce que les autorités fédérales de l'époque utilisaient pour identifier chaque Inuit, plutôt que d'utiliser leur nom.

« C'est en quelque sorte une autre partie du traitement inhumain que subissaient les Inuits à cette époque », a soutenu la source.

Le projet englobe quatre régions visées par des revendications territoriales nordiques : le Nunavut, le Nunavik dans le nord du Québec, le Nunatsiavut dans le nord du Labrador et la région désignée des Inuvialuit dans les Territoires du Nord-Ouest.

La base de données sera ouverte aux membres de la famille avec des documents identifiant leurs proches.

Il est souhaité que, une fois que les familles se seront manifestées, la base de données s'agrandira et aidera éventuellement d'autres familles qui ne disposent pas de documents à commencer à rechercher des proches disparus.

Au cours de la dernière décennie, un certain nombre de groupes et de personnes ont tenté d'identifier les Inuits décédés dans le sud du Canada alors qu'ils recevaient des soins contre la tuberculose.

En 2010, des membres de l'Église unie de la communauté mohawk de Kahnawake, au sud-ouest de Montréal, ont érigé une pierre commémorative après avoir identifié 15 Inuits inhumés dans un cimetière protestant.

Ils étaient âgés de deux mois à 74 ans et la plupart d'entre eux ont été identifiés par un seul nom.