Victime d'un succès qu'il préférerait ne pas avoir, le mouvement Vélo fantôme Montréal, qui peint des vélos en blanc en guise de monument pour les cyclistes tués dans les rues de la ville, songe à étendre ses activités de sensibilisation partout au Québec.

L'organisation souhaite aussi hisser des chaussures blanches sur les poteaux chaque fois qu'un piéton est fauché. 

« À la base, nous ne voulions pas que notre mouvement soit permanent. Nous voulions juste sensibiliser les gens à l'importance de protéger les plus vulnérables de la route, mais malheureusement, ça fait cinq ans qu'on installe des vélos fantômes, et il y a toujours autant de blessés graves et de morts. Alors nous voulons passer à une autre étape. Nous avons la volonté d'étendre nos activités partout au Québec et de représenter tous les usagers vulnérables de la route », a indiqué hier Laurent Deslauriers, un des fondateurs du mouvement Vélo fantôme Montréal. 

L'organisation citoyenne songe à s'incorporer pour pouvoir davantage structurer son action et trouver du financement. « Chaque fois qu'il y a un piéton ou un cycliste tué en dehors de Montréal, ça nous fait mal de ne pas être là, ajoute M. Deslauriers. Chaque année, il y a une cinquantaine de piétons qui sont tués dans la province. C'est dramatique. Ça prend une voix pour sensibiliser les gens à cette réalité. » Une première paire de chaussures peintes en blanc a déjà été érigée sur l'avenue du Parc, près du mont Royal, où la joggeuse Concepción Cortacans a été heurtée mortellement en mai dernier. 

HOMMAGE À  VALÉRIE BERTRAND DESROCHERS

Vélo fantôme Montréal organisait hier l'installation d'un vélo blanc à l'intersection de la rue Saint-Zotique et de la 19e Avenue, où la cycliste Valérie Bertrand Desrochers est morte écrasée par un camion en juin dernier. Un premier vélo symbolique avait été installé dans les jours qui ont suivi l'accident, mais il a fini par disparaître de façon nébuleuse. Une amie qui avait récupéré la bicyclette lourdement endommagée à la fin de l'enquête policière en a fait don à Vélo fantôme pour qu'un nouveau mémorial soit érigé au même endroit. 

C'est le père de la victime, Harold Desrochers, qui a hissé le vélo sur un poteau téléphonique cette fois-ci. « La première fois qu'ils l'ont accroché, j'étais pas capable de venir. Aujourd'hui, j'ai trouvé la force de le faire, et je l'ai fait parce que je refuse que Valérie soit décédée pour rien. C'est un symbole qui rappelle que les voies des cyclistes doivent absolument être mieux sécurisées, et surtout qu'il est crucial que l'harmonie se fasse entre les cyclistes, les automobilistes et les camionneurs. Ça n'a aucun bon sens comment les gens sont sauvages à Montréal, à Laval et ailleurs dans la métropole », a commenté M. Desrochers après l'événement. 

« Je reviens d'un voyage dans les Rocheuses, où j'ai suivi les traces de ma fille qui y avait voyagé. C'est le jour et la nuit par rapport à ici : là-bas, les gens arrêtent 10 pieds avant pour voir si tu veux traverser la rue. Ici, on n'a jamais été éduqués à respecter les cyclistes », estime-t-il. 

CONSULTATION PUBLIQUE

L'événement commémoratif d'hier se déroulait alors que la Ville de Montréal s'apprête à tenir une nouvelle consultation publique, ce soir, sur la sécurité des piétons et des cyclistes. « C'est une des premières séances de la Commission de la sécurité qui se déroule en public. Ce sera l'occasion pour les usagers les plus vulnérables de parler directement aux policiers », a affirmé la conseillère municipale Marianne Giguère, de Projet Montréal, présente lors de la cérémonie d'hier. 

« C'est un exercice non partisan qui permettra aux élus d'émettre un rapport et des recommandations. Le SPVM n'aura pas le choix d'en tenir compte », a-t-elle ajouté.