L'avocat de Thomas Harding a plaidé lundi que les gestes posés par le chef du train qui a déraillé au centre de Lac-Mégantic, en juillet 2013, n'étaient pas parfaits, mais qu'ils étaient néanmoins raisonnables.

La Couronne avait plaidé au procès que M. Harding n'avait pas appliqué le nombre requis de freins sur le convoi, qui était garé en légère pente ce soir-là, et que le chef de train n'avait pas testé adéquatement le système de freinage avant de partir pour la nuit à Nantes, à une quinzaine de kilomètres de Lac-Mégantic.

Dans ses plaidoiries finales, lundi, au palais de justice de Sherbrooke, Me Charles Shearson a admis que le chef de train Harding n'avait pas respecté toutes les règles lorsqu'il a garé le convoi pétrolier pour la nuit - en ne vérifiant pas tout le système de freinage, notamment.

L'avocat a toutefois soutenu que l'entreprise ferroviaire Montreal Maine and Atlantic (MMA) n'avait pas informé M. Harding des risques inhérents à cette procédure. Me Shearson plaide donc que si M. Harding n'a pas suivi effectivement les règles ce soir-là, il n'a pas commis pour autant un acte criminel en soi.

M. Shearson a soutenu qu'une dérogation aux règles ne constitue pas nécessairement un acte criminel, et qu'en analysant l'ensemble de la preuve, le jury doit conclure que M. Harding a démontré ce soir-là qu'il était un employé responsable.

Une fois garé pour la nuit à Nantes, le convoi rempli de pétrole brut s'est lentement ébranlé puis a pris de la vitesse et s'est emballé avant de dérailler puis d'exploser au coeur de Lac-Mégantic. La tragédie a fait 47 morts dans cette petite ville de l'Estrie, par une belle nuit d'été, le 6 juillet 2013. L'incendie, qui a fait rage pendant plusieurs jours, a dévasté une partie du centre-ville.

Le chef de train Thomas Harding, le contrôleur ferroviaire Richard Labrie et le directeur de l'exploitation de la MMA au Québec, Jean Demaître, ont tous trois plaidé non coupable à l'accusation de négligence criminelle ayant causé la mort.

Un incendie déterminant

Selon Me Shearson, la preuve au procès a démontré que le nombre approprié de freins qui devaient être appliqués n'a été déterminé qu'après la tragédie. Or, a plaidé l'avocat, le chef de train a appliqué ce soir-là les freins pneumatiques et un certain nombre de freins à main, tout en laissant tourner le moteur de la locomotive.

Selon Me Shearson, cela aurait été suffisant si les pompiers n'avaient pas coupé plus tard le moteur de la locomotive à la suite d'un début d'incendie. C'est à partir de là, a-t-il plaidé, que les freins pneumatiques ont perdu de leur efficacité.

L'avocat a par ailleurs insisté sur le fait que pour reconnaître M. Harding coupable, les jurés devraient conclure que le chef de train avait dérogé de façon substantielle aux règles, et que par son comportement, il avait fait preuve d'un mépris total pour la vie et la sécurité d'autrui.

Me Shearson a ainsi fait réentendre l'enregistrement d'une conversation téléphonique entre M. Harding et un collègue de la MMA la veille du drame. Informé de l'incendie qui s'était déclaré dans la locomotive, M. Harding demande s'il ne devrait pas se rendre sur les lieux, mais on lui répond de retourner se coucher.

L'avocat du chef de train doit terminer ses plaidoiries finales mardi, après quoi le juge Gaétan Dumas, de la Cour supérieure, devrait transmettre ses directives aux jurés, probablement mercredi. Les procureurs de la Couronne et les avocats de MM. Labrie et Demaître avaient présenté leurs plaidoiries finales la semaine dernière.