Un groupe de citoyens de Sutton qui s'est mobilisé pour freiner le développement immobilier tous azimuts de sa montagne a remporté hier une nette victoire en Cour d'appel contre la Ville de Sutton. Le plus haut tribunal de la province a annulé une série de règlements adoptés sans respecter la loi par la municipalité dans le but d'assouplir les contraintes de construction en montagne.

«Après trois ans et demi de bataille et de travail, on ne peut pas être plus satisfaits du contenu de la décision! C'est une victoire sur toute la ligne!», s'exclame au bout du fil Robert Benoit, un des 24 citoyens à l'origine de ce recours. Cette décision démontre la force des «contre-pouvoirs» et l'importance de la mobilisation citoyenne, se réjouit-il.

«C'est une grande victoire pour la protection de l'environnement», estime Me Bruce Johnston, dont le cabinet Trudel Johnston & Lespérance a représenté pro bono les citoyens en Cour d'appel. Il est très rare, selon lui, que la Cour d'appel annule ainsi un règlement d'une municipalité. «C'est un jugement qui sera très difficile à attaquer», analyse-t-il.

Règlements de zonage

Le litige porte sur l'adoption en 2015 de nouveaux règlements de zonage et de lotissement par la Ville de Sutton. Le but du maire de l'époque, Louis Dandenault, était de «faciliter et de stimuler» la construction résidentielle, notamment en montagne dans les zones de Protection d'altitude moyenne. Le coeur du débat n'avait toutefois rien à voir avec la protection de l'environnement et portait sur le respect de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme (LAU).

La municipalité se défendait d'avoir «remplacé» ses règlements et soutenait les avoir seulement «modifiés». Une nuance très importante qui lui permettait ainsi d'éviter de réviser son plan d'urbanisme comme l'y oblige la LAU. Les citoyens plaidaient que ces modifications constituaient en fait un «remplacement total» des règlements de zonage et de lotissement.

La Cour d'appel du Québec a donné raison aux citoyens hier en infirmant une décision de la Cour supérieure de janvier 2017. «Modifier et remplacer» sont deux notions «distinctes», rappelle la Cour d'appel. Ainsi, en modifiant 77% des dispositions du règlement de zonage, la Ville a carrément réformé son règlement. Or, elle pouvait seulement le faire lors de la révision quinquennale de son plan d'urbanisme.

Processus complexe

De plus, la Ville n'a pas respecté de nombreuses règles de consultation publique obligatoires pour l'adoption des règlements. Les citoyens pouvaient consulter un «résumé» de 172 pages pour en savoir plus. Résultat, l'information pertinente était noyée dans une «mer de dispositions». «La complexité du processus rendait manifestement illusoire l'exercice des droits démocratiques de ses citoyens», écrit la Cour d'appel.

Le maire de Sutton Michel Lafrance, élu l'an dernier, a décliné notre demande d'entrevue, expliquant qu'il n'avait pas lu le jugement au complet.