Un instructeur de l'École des recrues de Saint-Jean-sur-Richelieu s'en tire avec un blâme et une amende de 3000 $ pour avoir fait des attouchements sexuels à une recrue dans sa voiture en présence d'une autre soldate. Accusé l'an dernier d'agression sexuelle, le caporal-chef Pierre Desrosiers a plaidé coupable en cour martiale à des accusations réduites de conduite déshonorante et d'ivresse.

« Votre comportement inacceptable de décembre 2016 vous déshonore parce que tellement contraire aux principes de base d'une relation entre candidats et instructeurs », a conclu le juge militaire et capitaine de frégate Martin Pelletier dans sa décision rendue en mai dernier, mais rendue publique récemment.

CONGÉ DE NOËL

Deux recrues de l'École de leadership et de recrues des Forces canadiennes profitent du début de leur congé de Noël pour manger au restaurant Boston Pizza de Saint-Jean-sur-Richelieu, le 14 décembre 2016. Mais un de leurs instructeurs, alors attablé au bar, s'invite à leur table et met ses bras autour d'elles. Ivre, le caporal-chef Desrosiers suggère à l'une d'entre elles de quitter son copain et médit contre d'autres recrues du peloton.

Parties fumer un cigare avec leur instructeur, les deux recrues se retrouvent dans son véhicule en raison du froid. Une minute plus tard, le caporal-chef Desrosiers pose sa main sur la cuisse de la jeune femme sur le siège conducteur et continue de discuter avec la seconde recrue assise à l'arrière. Il commence à caresser la cuisse de sa victime qui tente de se distancer, mais reste coite.

L'instructeur glisse ensuite sa main sous le soutien-gorge de la recrue et lui empoigne la poitrine, toujours en présence de son amie. La victime tente alors de se libérer de son emprise en se tassant. Elle soutient n'avoir rien dit à son instructeur pendant les attouchements « pour éviter d'avoir des problèmes dans la poursuite de son cours de recrues », indique le résumé des faits présenté à la cour martiale. Les recrues refusent finalement d'être reconduites jusqu'à la base militaire et quittent le véhicule.

SANTÉ MENTALE

Le juge militaire note comme facteurs atténuants l'absence d'antécédent disciplinaire de l'accusé et son parcours sans faute pendant trois décennies au sein des Forces armées canadiennes (FAC). Le caporal-chef Desrosiers a été déployé en Bosnie et en Afghanistan à deux reprises. Il souffre d'ailleurs de problèmes de santé mentale en lien avec ses dernières missions.

Le juge relève toutefois de nombreux facteurs aggravants, dont le grade, le niveau d'expérience et le rôle d'instructeur du militaire de 48 ans.

« Une conduite de ce genre est sérieuse lorsqu'on agit envers un subordonné, mais est encore plus sérieuse lorsqu'on agit comme instructeur, surtout dans le cadre d'un cours de recrues, ceux-ci étant en situation de vulnérabilité significative envers les instructeurs chargés de leur évaluation sur un cours qui a un impact significatif sur la poursuite d'une carrière au sein des FAC », écrit le juge.

Lié par la suggestion des parties, le juge militaire a imposé un blâme et une amende de 3000 $ au caporal-chef pour ses deux crimes en vertu de la Loi sur la défense nationale.

Cette peine est similaire à d'autres peines imposées en cour martiale pour de tels crimes. Le juge était d'ailleurs tenu d'entériner la suggestion commune, à moins de considérer que cette peine est contraire à l'administration de la justice ou à l'intérêt public.

Dans les dernières années, plusieurs militaires se sont retrouvés devant la Cour martiale pour des crimes sexuels commis sur la base militaire de Saint-Jean-sur-Richelieu, également accablée par le suicide de plusieurs recrues. En juillet dernier, l'aviateur Barry Rutherford a été renvoyé des Forces pour s'être livré à des attaques gratuites contre une jeune militaire.