« C'est la première fois que je mets les pieds dans un palais de justice par la porte d'en avant », a lancé Philippe Boucher devant une petite salle bondée. « Je suis content ! »

M. Boucher est cet homme de 40 ans qui a récemment publié une lettre dans La Presse+ pour parler de ses problèmes de consommation et demander au gouvernement de mettre de l'avant une politique d'aide aux toxicomanes qui désirent s'en sortir.

Lundi, il avait plusieurs raisons de se réjouir.

Non seulement entrait-il au palais de justice de Montréal par la grande porte, mais il était assis aux premières loges en compagnie de la juge en chef de la Cour du Québec, Lucie Rondeau, de la juge adjointe de la Chambre criminelle et pénale, Danielle Côté, et de la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, qui avaient convoqué les médias pour annoncer l'élargissement du Programme de traitement de la toxicomanie de la Cour du Québec, à Montréal.

« Ce programme va sauver des vies, comme on a sauvé la mienne », a dit cet ancien animateur de radio et de télé de Gatineau, dont la vie a basculé, en janvier 2014, après une première arrestation pour conduite avec les facultés affaiblies.

DE QUEL PROGRAMME S'AGIT-IL ?

Du Programme de traitement de la toxicomanie de la Cour du Québec, lancé en 2012. En bref, ce programme permet aux toxicomanes accusés d'avoir commis des infractions criminelles de suivre une thérapie. Mais seules les personnes détenues étaient à ce jour admissibles. La nouveauté, c'est que tous les contrevenants toxicomanes ont désormais la possibilité de se soumettre à un traitement supervisé par le tribunal.

« Le Programme mise sur une véritable prise en charge de ces personnes, pendant et après une thérapie, pour les mener vers un changement durable de leur mode de vie », a expliqué la juge en chef Lucie Rondeau.

Les critères d'acceptation sont nombreux : la sécurité du public, les droits et les besoins des victimes, les faits qui sont à l'origine de l'infraction, les problèmes d'abus ou de dépendance, les besoins du contrevenant, ses antécédents judiciaires et sa motivation.

Le prononcé de la peine du contrevenant est reporté jusqu'à ce que tous les objectifs soient atteints. Il peut s'écouler de 12 à 18 mois à compter de la reconnaissance de culpabilité.

L'objectif de ce programme unique au Québec est de traiter un problème de toxicomanie ayant mené à la criminalité de façon à favoriser la réhabilitation et la réinsertion sociale ainsi qu'à prévenir la récidive.

« Détenus ou en liberté, les contrevenants ont les mêmes besoins : un accompagnement respectueux et bienveillant et la certitude que s'ils respectent les conditions du programme, le tribunal respectera aussi son engagement de leur imposer la peine prévue en cas de réussite », a fait savoir la juge Danielle Côté.

« Il ne faut pas oublier que le système de justice ne vise pas seulement à sévir et à punir, mais à réhabiliter », a ajouté la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée.

Depuis 2012, 235 personnes ont été intégrées à ce programme à Montréal.

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117 000 $ 

Le coût d'un prisonnier au Québec par année

29 000 $ 

Le coût d'un toxicomane qui fait le choix de se rétablir dans une maison thérapeutique. « Une bonne économie », dit Philippe Boucher.

235 

Le nombre de contrevenants qui ont suivi le Programme de traitement de la toxicomanie de la Cour du Québec, à Montréal, depuis son lancement, en 2012.

53 

Le nombre de personnes qui ont franchi toutes les étapes du programme avec succès.

6

Durant les six premiers mois de la thérapie, le contrevenant passe un minimum de trois tests de dépistage inopinés.